Cyberguerre : les prémices d'un nouveau champ de bataille ?
Entretien avec Julien Nocetti, enseignant-chercheur à l'Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan et chercheur associé à l'IFRI et à GEODE. Il détaille les caractéristiques de la cyberguerre et analyse la montée en puissance des attaques cyber.
Il dresse le bilan des actions menées par les grands acteurs de ce nouveau champ de bataille, tels que la Russie, la Chine, les Etats-Unis, l'Iran et Israël.
« Le terme de "cyberguerre" est disproportionné, car il n'y a pas encore eu de conflit cyber majeur. Cependant, le terme est entré dans le vocabulaire courant pour tenter de décrire les contours d'un cyberconflit de grande ampleur », explique Julien Nocetti.
« L'exemple de l'Estonie constitue le cas d'études par excellence lorsque nous cherchons à retracer les contours de cette conflictualité cyber. Son étude est intéressante car l'outil cyber a été utilisé pour répliquer à une action des autorités estoniennes qui fut perçue comme hostile ; en l'occurence, le déplacement d'une statue commémorant la mémoire soviétique. Durant deux semaines, des sites gouvernementaux et d'acteurs privés estoniens ont été paralysés à la suite d'attaques de déni de service (DDoS). Ces attaques ont été le point de départ d'une prise de conscience, à l'échelle globale, et en Occident particulièrement, du levier cyber à des fins politiques », détaille-t-il.
« Lors du mandat de Barack Obama ont eu lieu des tentatives d'apaiser les tensions avec la Chine à la suite des preuves d'intrusions chinoises constantes, que cela soit au niveau régalien ou économique. En 2015, Barack Obama et Xi Jinping signaient un pacte de non-agression dans le cyberspace, qui n'a pas duré bien longtemps avec l'arrivée de Donald Trump au pouvoir l'année suivante. Le cyberespionnage chinois est alors reparti de plus belle », rappelle Julien Nocetti.
« Certains Etats sous-traitent évidemment la conflictualité numérique et l'exemple le plus évident est celui de la Russie. Il existe en effet un brouillage quasi permanent entre l'écosystème cybercriminel national ou postsoviétique et les opérations cyberétatiques ».
« L'avantage du recours au cyber est de rester sous le seuil. Si l'on retrace l'histoire des cyberactivités, les principaux gains l'ont été dans une relative discrétion. Mais selon le stade de confrontation entre deux Etats, l'utilité du cyber peut être différente. L'action peut ainsi se dérouler à bas bruit ou avec un bruit de fond, mais il est tout à fait possible d'imaginer une attaque cyber d'ampleur, qui n'a pas encore été constatée dans le cas de la guerre découlant de l'agression russe de l'Ukraine, » analyse-t-il.
> Lire l'intégralité de l'entretien dans : Les Grands Dossiers de Diplomatie
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