La Turquie en 100 questions - La puissance opportuniste
La Turquie est-elle une démocratie ? Pourquoi Sainte-Sophie est-elle un symbole important ? Qui est Kemal Kılıçdaroglu, le « Gandhi turc » ? Peut-on réconcilier Kurdes et Turcs ? Y a-t-il un avenir européen pour la Turquie ? Est-elle amie ou adversaire avec la Russie ?
Depuis vingt ans, la société et l’économie turques se sont modernisées, sous la houlette de Recep Tayyip Erdogan. Mais le coup d’État raté de 2016 a entraîné le durcissement du régime, le fléchissement de la croissance et dopé les ambitions extérieures de son président. Influenceur islamique, proche des dirigeants africains, l’homme d’Ankara a embarqué son pays dans un double jeu diplomatique dangereux pour ses partenaires de l’OTAN. Dorothée Schmid nous fait comprendre comment, de puissance régionale, la Turquie est devenue un acteur incontournable dans un jeu mondial en pleine recomposition.
Dorothée Schmid, est responsable du programme « Turquie/Moyen-Orient » de l’Institut français des relations internationales (Ifri). Elle a dirigé l’ouvrage La Turquie au Moyen-Orient : une puissance régionale ?, CNRS Editions, 2011.
"La Turquie en 100 questions", Dorothée Schmid, Tallandier, 320 pages, 10,50 €
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Avec plusieurs objectifs en vue, dont celui de devenir un acteur diplomatique incontournable sur la scène régionale et internationale, Ankara tente de rapprocher Hargeisa et Addis Abeba qui s’opposent sur un accord entre ce dernier et le Somaliland. Si la troisième réunion prévue mi-septembre a été repoussée, l’initiative a permis de préserver un canal de discussion... Et les nombreux intérêts turcs dans la région.
Un Moyen-Orient entre guerres et recomposition
Dans un Moyen-Orient chaotique, la date du 7 octobre 2023 marque un tournant majeur qui peut conduire à un embrasement de toute la zone. La guerre à Gaza intervient dans une situation déjà en pleine évolution caractérisée par l’affirmation de l’autonomie stratégique de plusieurs puissances régionales de même que par un basculement géopolitique au profit de la Russie et de la Chine.
Iran et Israël : meilleurs ennemis
L’attaque de missiles iraniens sur le sol israélien le 13 avril 2024, suivie par une riposte d’Israël visant une base militaire proche d’un des principaux sites nucléaires iraniens, fut le point d’orgue d’une guerre multiforme qui oppose les deux pays depuis plusieurs décennies. Alors qu’Israël entretenait les meilleures relations, diplomatiques et même militaires, avec l’Iran du Shah Mohammad Reza Pahlavi, il est apparu très vite qu’il n’en serait pas de même avec la République islamique.
La France a-t-elle encore une politique arabe ?
Dès la fin de la guerre d’Algérie, la France a systématiquement repris contact avec les pays arabes qui avaient rompu les relations diplomatiques au moment de la malheureuse expédition de Suez de 1956. Ainsi se sont renouées ou nouées des relations actives et souvent confiantes, y compris avec des pays où elle était absente, comme les émirats du Golfe. Le président Chirac a voulu formaliser et conforter cette orientation lorsque le 6 mars 1996, à l’université du Caire, il a évoqué la « politique arabe et méditerranéenne » de la France. Par-delà quelques principes communs, il s’agissait naturellement d’une politique à géométrie variable selon les pays, avec la volonté d’être présent dans cet ensemble de pays qui sont nos voisins proches, situés dans une zone stratégique et dont d’importantes communautés vivent en France. Très tôt attachée à contribuer à la paix entre Israël et les pays arabes, la France prône une politique équilibrée entre le maintien de la sécurité d’Israël et le soutien du processus de paix israélo-palestinien qui donnerait le droit à l’autodétermination des Palestiniens et à la création d’un État. À cet égard, l’année 2007 représente une rupture due à l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy qui sur ce plan, comme sur d’autres, a pris le contre-pied de son prédécesseur. Depuis lors, la politique de la France dans cette région n’a plus la même priorité, réagit plus qu’elle n’agit et semble flotter entre une volonté de maintenir ses liens avec les pays arabes et une certaine complaisance à l’égard d’Israël.