La vision indo-pacifique de l’administration Trump : un flou stratégique
La stratégie indo-pacifique de l’administration Trump constitue une illustration parfaite d’une politique étrangère élaborée par un pouvoir exécutif divisé.
Ayant identifié la compétition avec la Chine comme une priorité en matière de sécurité nationale, et ayant abandonné le « pivot » de l’administration Obama, l’administration Trump a commencé à dessiner les contours de son approche pour un Indo-Pacifique libre et ouvert, sans parvenir toutefois à la transformer en stratégie concrète. Si des efforts (modestes) ont été déployés pour mettre en place une stratégie opérationnelle, le président américain a adopté de son côté une approche essentiellement sino-centrée, mettant l’accent sur le recours à des sanctions punitives et sur la question coréenne. On notera en outre une contradiction flagrante entre les principes fondamentaux qui sous-tendent le concept d’Indo-Pacifique et les convictions du président. Dès lors en matière de politique vis-à-vis de la Chine, deux grands courants de pensée coexistent aujourd’hui, qui ont très peu de chance de converger dans les deux années à venir.
Pour autant la stratégie indo-pacifique n’est pas nécessairement condamnée à tomber dans les oubliettes de l’Histoire. Que l’appellation persiste ou non, les principaux éléments de cette approche ont de bonnes chances d’être repris par une nouvelle administration et sont parfaitement cohérents avec les objectifs plus larges des Etats-Unis dans la région. Bien au-delà de la Maison Blanche, le consensus à Washington est que la concurrence entre les Etats-Unis et la Chine va s’accentuer, et qu’une stratégie américaine holistique s’impose. Toute stratégie future devra selon toute vraisemblance s’appuyer sur les pays alliés et partenaires, souligner l’importance des démocraties, chercher à sécuriser la première chaîne d’îles et l’Asie maritime, et offrir aux partenaires européens plus d’opportunités de s’engager. Cette stratégie se heurtera sans doute à de nombreuses difficultés liées à la volonté des pays de la région de s’aligner sur les objectifs américains, à leur capacité à engager les ressources nécessaires, ou encore à la profonde défiance qu’aura engendrée l’administration Trump. Les pays alliés et partenaires des Etats-Unis doivent toutefois rester convaincus que la stratégie indo-pacifique sera un jour mise en place, c’est pourquoi ils doivent chercher à la développer par eux-mêmes, en attendant le retour d’un leadership américain dans la région.
Ce contenu est uniquement disponible en anglais : The Indo-Pacific Vision in Strategic Limbo: A Foreign Policy Case Study for the Trump Era
Contenu disponible en :
Régions et thématiques
ISBN / ISSN
Utilisation
Comment citer cette publicationPartager
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analysesLa coopération de sécurité maritime dans le Pacifique
La France joue un rôle important dans la sécurité maritime du Pacifique, notamment à travers la participation active de ses territoires d'outre-mer et la contribution de ses forces armées stationnées aux initiatives de coopération régionale.
L'IA et les normes techniques en Chine et dans l'UE : Priorités divergentes et le besoin de terrain d'entente
Vu le potentiel hautement perturbateur de l'IA, la coopération mondiale en matière de sécurité et de gouvernance de l'IA est primordiale. Cependant, le potentiel profondément transformateur de l'IA garantit également qu'un niveau élevé de concurrence et de rivalité systémique est probablement inéluctable. Comment l'UE peut-elle gérer au mieux sa relation complexe avec la Chine dans le domaine de l'IA afin d'assurer un niveau nécessaire de coopération malgré la concurrence et les rivalités ?
L’essor du programme spatial taïwanais : Construire une industrie, soutenir la sécurité nationale
Taïwan, connu pour son leadership dans le domaine des semi-conducteurs et des technologies de l’information et de la communication (TIC), fait aujourd’hui des progrès significatifs dans l’industrie spatiale. Bien qu’historiquement modeste, le programme spatial taïwanais s’est transformé depuis 2020, sous l’impulsion de la présidente Tsai Ing-wen qui s’est engagée à développer les capacités spatiales du pays. Parmi les étapes clés figurent l’adoption de la loi sur le développement spatial et la création de l’Agence spatiale taïwanaise (TASA), qui a renforcé les ressources et la visibilité des ambitions spatiales de Taïwan.
La surproduction chinoise de puces matures : Des craintes infondées
La Chine, plutôt que d’inonder le marché mondial des semi-conducteurs à technologies matures, s’en dissocie. Si les politiques industrielles chinoises favorisent de plus en plus la production nationale de semi-conducteurs, sa propre demande en puces, en constante augmentation, devrait empêcher une arrivée massive de puces chinoises à bas prix sur les marchés étrangers. Cependant, à mesure que Pékin progresse dans son objectif de réduire la dépendance des industries nationales aux puces étrangères, les entreprises européennes et américaines de semi-conducteurs à technologies matures pourraient ressentir les effets d’un écosystème de semi-conducteurs chinois de plus en plus « involué » (内卷).