Avec la guerre en Ukraine, le retour à l’ambiguïté stratégique, principe indispensable de la doctrine nucléaire
Plonger l’ennemi dans l’incertitude sur ce que sont nos intentions ou ce que sera notre riposte : l’ambiguïté stratégique est une pratique très ancienne, déjà théorisée dans L’Art de la guerre, du Chinois Sun Tzu, au VIe siècle avant notre ère. Si cette notion n’est pas liée à la seule dissuasion nucléaire, elle y trouve néanmoins sa pleine dimension en raison des enjeux et des risques propres à l’arme atomique.
La doctrine nucléaire française telle qu’elle s’est précisée depuis les années 1960 se garde bien de spécifier quels sont les intérêts vitaux de la nation qui, s’ils étaient attaqués, entraîneraient une réponse par le feu nucléaire. C’est le chef de l’Etat et lui seul qui, en ultime instance, décide d’appuyer sur le bouton.
« L’arme nucléaire est indissociable du système de la Ve République ; c’est aussi pour cela que le chef de l’Etat est élu au suffrage universel. Mais aux Etats-Unis ou en Russie, le président a ce même pouvoir de décision sur le feu nucléaire », souligne Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique, qui a notamment écrit, avec Jean Guisnel, Le Président et la bombe. Jupiter à l’Elysée (Odile Jacob, 2016).
Ce flou assumé sur « les intérêts vitaux de la nation » vise à laisser une marge d’appréciation au décideur politique quant à la nature de la riposte et à créer le doute pour le potentiel agresseur sur ce que seront les conséquences de son attaque. Il y a toujours en mer au moins un, voire deux, sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE) à même de tirer les missiles ; la France en compte trois depuis le début de la guerre en Ukraine.
« L’objectif est de conserver une ambiguïté qui laisse au président de la République la liberté de décider en situation la nature et le périmètre de nos intérêts vitaux », explique Elie Tenenbaum, directeur du Centre des études de sécurité à l’Institut français des relations internationales (IFRI).
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