De Marseille à l'US Air Force : Nicolas Chaillan, le geek qui veut sauver l'Amérique
Dans les colonnes du Financial Times ou sur Fox News, cet expert en cybersécurité s'alarme : s'ils ne réagissent pas, les États-Unis ont déjà perdu la guerre contre la Chine. Quelle crédibilité accorder aux prophéties de ce Français devenu petit génie du Pentagon ? Éléments de réponse.
Le Financial Times n’est pourtant pas connu pour faire dans le tapageur. Mais voilà que le titre d’un article paru le 10 octobre 2021, attire nos yeux distraits. « Les États-Unis ont déjà perdu la guerre de l’intelligence artificielle contre la Chine, selon un ancien du Pentagone ». Pour illustrer l’article, le portrait d’un homme de 38 ans, front haut, sourire roublard sur fond de bannière étoilée. « Les lacunes des États-Unis dans le domaine cyber mettent en danger l’avenir de [nos] enfants », explique-t-il au vénérable quotidien britannique. « Nous n’avons aucune chance face à la Chine dans 15 ou 20 ans. C’est déjà joué. » Les sentences d’un énième faucon américain, prophète de l'apocalypse ? Peut-être. Mais Nicolas Chaillan est aussi Français. Un parcours atypique, unique, de Marseille jusqu’à des postes d’observation exceptionnels : conseiller du secrétaire à la Défense sur les questions de cybersécurité, puis responsable de l'ensemble des logiciels de l'US Air Force. Il y a un an, il a démissionné de ces fonctions prestigieuses. Officiellement, pour protester contre l'immobilisme de l’administration américaine face à la menace chinoise.
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Conviction profonde ou opportunisme ? Taper sur la Chine est devenu un créneau porteur aux États-Unis. « Rien de tel que de désigner un ennemi pour fédérer », rappelle Alexandre Papaemmanuel, expert en renseignement et enseignant à Science Po.
« Nicolas Chaillan tient un discours très virulent mais c’est devenu assez traditionnel outre-Atlantique, abonde Marc Julienne, chercheur et responsable des activités Chine à l’Institut français des relations internationales (Ifri). Aujourd’hui, les démocrates comme les républicains sont sur une ligne dure à l’égard de Pékin. D’ailleurs, il n’y a pas eu de changement de braquet entre Trump et Biden. La différence, c’est où est ce qu’on place le curseur. Il y a une sorte de surenchère pour montrer qui ira le plus loin. »
Cinquième colonne
À ce petit jeu, le Français pousse le bouchon très loin. Au point que ses prophéties et sentences définitives agacent plusieurs spécialistes de la chose militaire. « Il fait beaucoup de déclarations à l’emporte pièce. Alors que son expérience au sein des forces armées est assez faible », attaque l’un d’eux, sous le sceau de l’anonymat. Un autre : « Peut-être que la Chine a infiltré certains réseaux électriques américains. Mais de là, à mettre à terre tout le système… Et encore si elle le faisait, la réponse américaine serait d’autant plus forte. Ce serait une déclaration de guerre. » Marc Julienne de l’Ifri, tente aussi de relativiser. Il faut bien reconnaître la percée de la Chine dans les domaines cyber, de l’intelligence artificielle, du machine learning. Mais gare à la tentation d’enterrer trop vite les Américains, de très loin le premier budget militaire au monde (740 milliards contre 230 pour la Chine). Le chercheur rappelle aussi que les États-Unis sont loin d’être inactifs contre le régime de Pékin. Après avoir annoncé un investissement de 52 milliards pour la production maison de semi-conducteurs, Washington a dévoilé le 7 octobre dernier, un plan visant à restreindre fortement l’exportation vers la Chine de ces technologies ultra-stratégiques.
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>> Retrouver l'article en intégralité sur le site de Vanity Fair.
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