De par le monde : Justin Trudeau et le burkini
Complexe, déplaisant, parfois même ridicule, le débat sur le burkini aura empoisonné notre mois d’août.
Complexe, déplaisant, parfois même ridicule, le débat sur le burkini aura empoisonné notre mois d’août.
Il met en lumière la contradiction entre notre exigence de tolérance et d’acceptation de l’autre, et la valeur que constitue l’absence d’emprise du religieux dans notre sphère publique, dans
laquelle hommes et femmes doivent avoir une présence et un statut égaux. Aussi l’embarras ne fait-il que croître devant les réactions plutôt acides rencontrées par ce débat à l’étranger,
notamment en Amérique du Nord.
Le Premier ministre du Canada Justin Trudeau a pris fait et cause pour le droit de porter ce vêtement ; le New York Times a publié une série d’articles assez réprobateurs sur le sujet avant d’inviter les femmes musulmanes françaises à parler de leur ressenti. Il en ressort in fine que la controverse sur le burkini serait guidée avant tout par le racisme inhérent des Français. Pourquoi une telle perception ? Américains et Canadiens ne peuvent comprendre notre débat, les premiers parce qu’ils n’ont pas la même vision du fait religieux, les seconds parce qu’ils pratiquent un multiculturalisme beaucoup plus radical.
Un "laisser-faire" face au fait religieux
L’un des premiers épisodes du récit national américain est l’arrivée, à bord du Mayflower en 1620, de Puritains fuyant la répression en Grande-Bretagne et l’assimilation en Hollande. L’une
des raisons d’être de la fondation du pays est ainsi de pouvoir pratiquer sa religion loin d’autorités étatiques hostiles – rien à voir avec notre libération face à l’Église catholique en 1789
puis en 1905. Cette attitude de "laisser-faire" face au fait religieux se trouve renforcée par le fort sentiment d’individualisme des Américains, pour lesquels l’idée que l’État légifère dans un
domaine aussi personnel que l’habillement est incompréhensible.
Le Canada a longtemps vu sa majorité anglophone réprimer les minorités, qu’il s’agisse des tribus amérindiennes ou des Québécois francophones. L’un des effets de la Révolution tranquille des années 1960 a été de renverser tout cela. Depuis, citoyens et institutions mettent un point d’honneur à respecter toutes les minorités du pays, même celles de l’extérieur. Active et généreuse, la politique d’immigration n’impose pas aux Néo-Canadiens de renoncer à leur culture d’origine – même si dans les faits les candidats sont soigneusement sélectionnés par Ottawa.
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