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Élections de mi-mandat : un référendum pro ou anti Trump ?

Interventions médiatiques |

article publié dans Sud Ouest 

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Ce scrutin de mi-mandat est un référendum sur le bilan, mais surtout la personne de Donald Trump, note la politologue Laurence Nardon. Interview

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« Sud Ouest Dimanche » Quel est l’enjeu de ces élections ?
Laurence Nardon (1). Deux ans après celle du président, elles sont traditionnellement l’occasion pour les votants de juger son bilan. Ce fut le cas, en 2010 et 2014, sous Barack Obama. Mais cette fois, ce référendum national se concentre sur la personne même de l’étrange Donald Trump.
 
L’enjeu local n’a-t-il pas de poids?
Si bien sûr, mais les sondages disent cette polarisation sur Trump et la vision que peuvent en avoir les Américains: celle d’un dirigeant d’extrême droite, au discours anti-élite, mais aussi le cas rare à ce niveau de responsabilité d’une personnalité narcissique, agressive, imprévisible, qui peut gêner, y compris certains de ses électeurs populaires.
 
Trump a-t-il orienté la campagne?
En partie. Quand on interroge les électeurs, ceux qui penchent pour les démocrates sont sensibles aux questions de santé ou raciales, tandis que les prorépublicains privilégient l’économie ou le port d’armes. Mais le sujet de l’immigration intéresse tout le monde et Trump, aidé par l’actualité de cette caravane d’immigrants en marche depuis le Honduras, en a fait le sujet principal, devant la sécurité et le terrorisme. Que le thème soit clivant a tout pour plaire à Trump, passé maître dans l’art d’imposer, via ses tweets, l’agenda politique en grand communicant qu’il est.
 
Sait-il le faire sur tous les sujets?
Sur l’économie, c’est facile, car elle se porte bien et Trump s’en glorifie. Il est même parvenu, en plein mouvement #MeToo, à inverser en sa faveur la polémique sur la nomination à la Cour suprême de Brett Kavanaugh, en défendant mordicus l’idée qu’il n’y a pas de preuves que le juge soit coupable de violence envers une femme. Sur les sujets internationaux, Trump peut rétorquer aux démocrates qui l’accusent d’abaisser l’image des États-Unis, qu’il a de grands succès à son actif sur la Corée ou le retrait de l’accord climatique, et qu’il est « le meilleur ». Sa rhétorique est efficace.
 
Les Américains n’ont-ils pas appris à la décrypter?
Peut-être, mais les lignes n’ont guère bougé depuis 2016. Le président garde environ 40% d’opinions favorables auprès de gens qui jugent qu’il a rempses promesses. En face, 52% des Américains lui sont défavorables, dont une fraction de démocrates progressistes qui le détestent. Reste un marais assez étroit: c’est lui qui fera la différence.
 

Le parti démocrate s’est-il rétabli de sa cuisante défaite de 2016?
Non. Il est dans les limbes, toujours écartelé entre le courant libéral d’Hillary Clinton et le radicalisme de Bernie Sanders. Des primaires les ont départagés pour installer les candidats du parti à ces élections, mais la réconciliation n’a pas eu lieu: des électeurs démocrates, notamment chez les jeunes, dénoncent le tropisme ultra-libéral d’Hillary qu’ils accusent de « travailler pour Wall Street» en s’abritant derrière la défense des minorités, devenue le cœur du programme des démocrates au détriment de son traditionnel électorat de «cols-bleus», largement passé chez Trump.
 

Cet engagement des jeunes, mais aussi des femmes, n’est-il pas un espoir pour les démocrates?
Sûrement. La mobilisation des femmes est nationale: ce sont souvent des blanches, diplômées, très anti-Trump mais pas très à gauche. A contrario, leralliement des jeunes se fait beaucoup sous la bannière de Sanders, dont ils approuvent la proposition d’une éducation supérieure gratuite, qui fut déjà le thème phare de sa campagne des primaires démocrates, en 2016. Sur l’économie, ils défendent un projet plus innovant que celui des «clintoniens», qui ne diffèrent pas des républicains sur ce terrain-là.
 

Barack Obama s’engage. Avantage pour les démocrates?
Pas sûr. Ses discours sont très remarqués, mais le fait qu’il se mobilise dans la campagne souligne la panne de leadership chez les démocrates. La formation n’a pas de ligne, ni de leaders. Par conséquent, c’est déjà fichu pour 2018. Et si personne d’un peu charismatique ne se lève, cela semble mal parti pour 2020.
 

Trump est donc tranquille?
Les sondages nationaux ne veulent pas dire grand-chose et Trump bénéficie d’un découpage des circonscriptions plutôt défavorable aux démocrates. Ces derniers pourraient gagner une courte majorité à la Chambre des représentants, mais pas au Sénat. Au final, cela pourrait n’avoir aucune incidence véritable, car Trump a déjà du mal, avec le Congrès tel qu’il est, à y faire passer des lois, d’où sa préférence pour la voie réglementaire. Un échec à la Chambre des représentants ne changerait sans doute rien.
 

Recueilli par Christophe Lucet
 
Laurence Nardon est docteur en sciences politiques à l’université Paris-1.
Elle dirige le programme Amérique du Nord de l’Institut français de relations internationales (Ifri).
 
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