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Guerre en Ukraine: quel impact sur les « nouvelles routes de la soie »?

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interviewée par Joris Zylberman pour

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Dommage collatéral de taille : la guerre en Ukraine est venue percuter le projet pharaonique cher à la Chine de Xi Jinping : les « nouvelles routes de la soie ». En particulier la route ferroviaire de marchandises qui relie le territoire chinois à l'Europe, via le Kazakhstan, la Russie et la Biélorussie. Cette voie a connu un succès commercial grandissant ces dernières années. Les explications de Françoise Nicolas, directrice du Centre Asie de l'Institut français des relations internationales.

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Françoise Nicolas : Cette route sino-européenne a été une grande réussite depuis son lancement. On a eu en 2021 si je ne m’abuse, la barre du million de conteneurs transportés par cette voie ferroviaire, donc pour la Chine c’est important et puis pour l’Europe c’est important aussi parce que par ce biais-là, l’Europe est connectée de manière plus étroite à la Chine et cette connexion, ces liens, ne sont pas des liens à sens unique, c’est vrai que ça permet essentiellement à la Chine d’exporter vers l’Europe, mais ça permettait aussi, de plus en plus, à l’Europe d’exporter vers la Chine.

RFI : Alors en quoi cette route ferroviaire de la soie est-elle affectée par la guerre en Ukraine ? Est-ce qu’elle est suspendue ? Est-ce qu’elle est entravée sur le long terme ?

Françoise Nicolas : Elle est affectée d’abord parce que une des options, c’était de traverser l’Ukraine, alors ça n’est pas la voie principale, j’en conviens, mais malgré tout c’était une option qui était de plus en plus utilisée pour précisément désengorger ou alléger la voie qui passe plus au nord par la Russie, le Kazakhstan toujours, puis la Russie, puis la Biélorussie. Or, avec la guerre, cette voie via l’Ukraine est complètement bloquée. Le deuxième impact c’est que en raison des sanctions imposées par l’Union européenne sur la Russie nombre d’opérateurs ont également décidé de se désengager des transports qui passaient par la Russie et la Biélorussie.

Tous les opérateurs n’ont pas réagi de la même manière il y en a qui continuent d’opérer, mais évidemment à niveau nettement inférieur, mais tous les opérateurs européens eux se sont complètement arrêtés de transporter à travers la Russie… La raison, c’est qu’ils craignent d’une part les sanctions, et quand bien même ils ne seraient pas sanctionnés ce qu’ils craignent aussi c’est éventuellement des troubles en Russie ou que la Russie prenne des mesures qui leur seraient évidemment totalement contraires à leurs intérêts.

RFI : Et si on regarde la situation maintenant, est-ce que la Chine a un plan B ? Une voie de contournement ? Une Route de la soie alternative ?

Françoise Nicolas : La Chine ne manque jamais d’imagination, donc la Chine se creuse la tête pour essayer de trouver une voie de contournement. Il y a une possibilité, c’est à partir du Kazakhstan de traverser la Caspienne de passer par la Géorgie, puis la Turquie et ensuite rejoindre l’Europe par ce biais-là, c’est une possibilité mais c’est une possibilité qui est extraordinairement complexe. Il faut déjà traverser la Caspienne, ce qui nécessite un transport de moins, du train sur le bateau, ce qui est coûteux à la fois en temps et du point de vue financier. L’autre alternative c’est de revenir à la voie maritime et là on revient à la route maritime de la soie mais là, l’inconvénient c’est que ça prend beaucoup plus de temps, l’idée c’était quand même de connecter beaucoup plus rapidement la Chine et l’Europe et de ce point de vue il n’y a pas véritablement de plan B.

RFI : Est-ce que le fait que la Chine refuse de condamner l’invasion russe en Ukraine, est-ce que cela ne va pas remettre en cause la réputation de la Chine et surtout la réputation des nouvelles routes de la soie en Europe ?

Françoise Nicolas : Je suis tout à fait d’accord que l’impact de la guerre en Ukraine, il sera beaucoup plus fort sur l’image même de la Chine, avec le positionnement toujours extrêmement ambigu qu’elle a dans le conflit, sur le soutien non officiel à la Russie mais de facto qui est bel et bien là, et je pense qu’elle a plus à perdre de ce point de vue que dans la perte de transport de quelques conteneurs qui ne sont plus transportés de la Chine vers l’Europe.

Et dans la mesure où les Routes de la soie, ça n’est pas que des infrastructures c’est aussi beaucoup d’influence politique, là la Chine a plus de souci à se faire, et je crains qu’elle n’ait effectivement perdu de son attrait aux yeux de certains.

 

> Retrouvez le podcast dans son intégralité sur le site de RFI.

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Françoise NICOLAS

Françoise NICOLAS

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Conseillère au Centre Asie de l'Ifri

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