La garde rapprochée de Vladimir Poutine
Le cercle qui peut influencer le président russe s’est réduit à une poignée de galonnés et de faucons qui partagent sa vision du monde, au service de la « Grande Russie ».Sous pression, la plupart des oligarques sont relégués à distance du pouvoir.
C’est une séance pour l’histoire. En ce 21 février, Vladimir Poutine réunit les plus hauts dignitaires du régime pour une réunion très spéciale du conseil de sécurité de la Fédération de Russie. Fait rare, des caméras filment l’événement destiné à être diffusé à la télévision en différé. À l’ordre du jour : faut-il ou non reconnaître l’indépendance des territoires séparatistes de Donetsk et Louhansk, dans l’est de l’Ukraine ? Trônant derrière son bureau à une dizaine de mètres, le président distribue temps de parole, coups de griffes et humiliations à ses ministres et autres responsables des organes de sécurité. Le malaise est palpable chez ses subordonnés, qui en sont réduits à chercher les mots susceptibles de plaire au maître du Kremlin. L’exercice de consultation tourne à une démonstration d’autoritarisme aigu.
Dans la salle, il y a ceux qui savent qu’une « opération spéciale » – selon la terminologie à Moscou – se prépare dans le plus grand secret, et les autres. Les premiers se comptent sur les doigts d’une main. Ils portent des galons et appartiennent à la catégorie des silovikis : les membres issus des agences du maintien de l’ordre et de la sécurité, véritable matrice du système politique russe. Passés par le KGB, la plupart sont de la même génération que Vladimir Poutine dont ils épousent le point de vue sur la fin de l’Union soviétique perçue comme une tragédie. En ces temps où le conflit en Ukraine prime sur tout le reste, cette garde prétorienne a plus que jamais l’oreille du maître du Kremlin.
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Autre homme fort du Kremlin, le ministre de la défense, Sergueï Choïgou, exerce le rôle de serviteur zélé. Né il y a soixante-six ans dans la région de Touva (Sibérie), l’homme n’est jamais très loin de son patron avec qui il part chasser, pêcher et bivouaquer dans sa région natale. Ce collectionneur d’épées, passionné de chamanisme, a supervisé la planification des opérations militaires en Crimée, en Syrie et aujourd’hui en Ukraine. Il a la mainmise sur le renseignement militaire accusé d’avoir tenté d’assassiner l’ex-espion Sergueï Skripal en mars 2018.
« S’il bénéficiait de la confiance de Poutine, il semble avoir un peu perdu du crédit depuis le déclenchement du conflit », pense Tatiana Jean, chercheuse à l’Institut français des relations internationales (Ifri).
Sergueï Choïgou est avant tout un exécutant, un rôle qu’il partage avec de vrais spécialistes de l’armée comme le chef d’état-major Guerassimov, penseur de la guerre hybride, et avec les patrons des organes de sécurité que le chef de l’État consulte régulièrement. « Tous cherchent en fait le plus souvent à deviner les désirs et projets présidentiels plutôt qu’à le conseiller », avance, à Moscou, le politologue indépendant Mikhaïl Vinogradov.
« Il y a un phénomène d’auto-intoxication : il est plus confortable d’approuver le chef afin de préserver son pré carré », ajoute Tatiana Jean.
Un management qui a pu jouer de mauvais tours lors de la prise de décision autour de l’Ukraine et d’une intervention supposée « rapide ».
> L'article en intégralité sur La Croix.
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