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Parti communiste chinois : cent ans et un grand bond en avant totalitaire

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cité par Arnaud Vaulerin dans

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La célébration de la création du parti communiste, qui démarre ce jeudi, est l’occasion de rappeler la mainmise de cette institution sur la société et l’économie chinoise ainsi que le rôle central de Xi Jinping dans le verrouillage du pays.

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Il dirige tout, surveille tout. Et règne en toute puissance comme jamais. Le parti communiste chinois qui célèbre ce jeudi les cent ans de sa fondation - bien qu'il ait été créé le 23 juillet 1921 à Shanghai - a officiellement indiqué à ses ouailles le chemin à emprunter : «Suivre le parti pour toujours». Une recommandation-survie avec un parfum d'éternité. Et, bien sûr, sous la conduite du nouveau timonier, Xi Jinping, le dirigeant chinois le plus puissant depuis Mao. A 68 ans, il concentre les pouvoirs de président de la République, de secrétaire général du PCC et de président de la puissante commission militaire centrale. «Président de tout», comme il est surnommé.

Arrivé au pouvoir en 2012, le nouvel empereur rouge entend incarner au XXIe siècle le «rêve chinois» comme un contrepoint-revanche à l'american dream (rêve américain) du XXe. Et devenir celui qui fera accéder la Chine au statut de première hyperpuissance de la planète, si possible d'ici 2049, pour la «résurrection de la grande nation chinoise» et l'autre centenaire : la fondation de la République populaire.

  • «Sur la scène internationale, comme en interne, la politique de Xi Jinping est devenue extrêmement autoritaire et provocatrice, analyse Marc Julienne, responsable au centre Asie de l'Institut français des relations internationales (Ifri). Xi a remis l'Etat sous la férule du parti, en lui donnant un simple rôle d'exécutant au service de la politique et de l'idéologie du parti. C'est une rupture dans l'histoire du PC. Il chemine actuellement sur la voie d'un nouveau totalitarisme dont la puissance économique, technologique et militaire est tout aussi préoccupante que ses vulnérabilités.» (1).

C'est peu de dire que Xi Jinping n'a guère suivi le conseil du Premier ministre Wen Jiabao qui, en 2011, appelait à «mettre un terme à l'absolutisme du parti». Il a fait exactement le contraire. Il a renforcé le PCC, en inscrivant son «rôle dirigeant» dans la constitution, en abolissant la limite des mandats et d'âge et la «direction collégiale», promue par Deng Xiaoping, père de la modernisation de la Chine.

  • «Il a réduit les chaînes de commandement et confié au parti la gestion des affaires religieuses et ethniques, les Chinois d'outre-mer», poursuit Marc Julienne.

«Chasse aux tigres et aux mouches»

Puis, il a érigé le concept de «sécurité nationale» aussi bien en Chine qu'à Hongkong, en prenant la haute main sur l'appareil sécuritaire pour mieux asseoir son pouvoir et enrégimenter les minorités, à commencer par les Ouïghours du Xinjiang. Ce maillage du pays par le parti n'épargne pas le monde des entreprises : «toute organisation comptant trois membres du PCC ou plus doit créer une cellule du parti et 73 % des 15 millions des sociétés privées l'ont déjà fait», précise l'Institut Mercator pour les études sur la Chine (Merics).

Au nom de la lutte anticorruption lancée dès son arrivée, Xi Jinping s'est livré à la «chasse aux tigres et aux mouches», selon sa propre expression, pour virer hauts responsables comme petits fonctionnaires corrompus. Cette colossale opération «mains propres» menée jusqu'en 2018 par la redoutable commission centrale de discipline du parti a lessivé des centaines de milliers de personnes. Elle a également permis de redorer l'image du parti et, surtout, de neutraliser tous les rivaux potentiels de l'empereur rouge. Et de générer aussi des frustrations, des frictions qui sont autant de fragilités et de risques pour l'équipe dirigeante.

«On assiste aussi à un renforcement de la surveillance mutuelle entre camarades, des séances de critique et d'autocritique (héritées de l'ère Mao), de confessions forcées. Cette campagne, qui est rapidement devenue un mouvement de recadrage politique et idéologique, continue de faire peur au sein du parti et de la fonction publique, note Alice Ekman, analyste en charge de l'Asie à l'Institut des études de sécurité de l'Union européenne et auteure de Rouge vif (2). Ce sentiment de peur s'est renforcé, notamment parmi les cadres qui redoutent de prendre des initiatives, de se faire dénoncer.»

«Cacher sa gloire, en attendant son heure»

  • Discipline et loyauté sont les maîtres-mots exigés des membres d'un PCC «rattrapé par le culte de la personnalité de Xi, le coeur du parti, selon le mot utilisé pour Mao», reprend Marc Julienne.

Le PCC compte aujourd'hui 95 millions d'encartés (la plus grande organisation politique au monde après le BJP en Inde) passés par un processus de sélection d'au moins deux ans. Il est encore très masculin (à l'image des 7 caciques du comité permanent du bureau politique), avec une petite majorité de diplômés universitaires.

[...]

A l'heure de la diplomatie agressive des «Loups combattants», le parti guide vers le «renouveau de la nation chinoise», d'après Xi. Cette affirmation défiante d'une grandeur retrouvée, sinon une visée hégémonique, s'exprime dans des démonstrations de force dans les eaux de la Mer de Chine, à Hongkong, sur les plateaux du Ladakh, au large de Taïwan.

  • «Même si son image et ses partenariats se dégradent, la Chine n'hésite plus à afficher des postures très affirmées à l'international. Mais n'est-ce pas un moyen de paraître forte en interne, le révélateur d'une faiblesse?», interroge le chercheur de l'Ifri, Marc Julienne.

«Forces hostiles»

Plus nationaliste que jamais, la Chine de Xi défend un nouveau modèle de civilisation autoritaire face à la démocratie constitutionnelle, aux valeurs universelles, aux sociétés civiles, promues par des «forces hostiles» occidentales. Ces périls susceptibles de menacer le régime chinois, selon Pékin, figuraient dans un document d'avril 2013 édicté par le comité central du PCC.

  • Cette «dérive néo-totalitaire du parti», selon l'expression du chercheur de l'Ifri, Marc Julienne, concerne également la réinterprétation par la Chine de sa propre histoire. «On pourrait penser que les mémoires s'apaisent, que les langues se délient. Il n'en est rien.

La Chine défend une vision positive de l'héritage de Mao. Dans la nouvelle version de l'histoire du PCC, une seule page est consacrée à la Révolution culturelle qui a fait des millions de morts entre 1966 et 1976, contre un chapitre entier dans l'édition précédente. Xi Jinping a droit à un quart des 530 pages alors qu'il n'est au pouvoir que depuis huit ans.» Le printemps de 1989, le massacre de Tiananmen et la figure du prix Nobel Liu Xiaobo mort en prison en 2017, pour ne citer que trois exemples, restent les grands effacés de l'histoire officielle d'un parti lancé dans une fuite en avant.
 

> Retrouver l'article intégral sur le site de Libération.

 

 

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Marc JULIENNE

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Directeur du Centre Asie de l'Ifri
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