Turquie, Qatar : des entremetteurs intéressés
Depuis le début du conflit Russie/Ukraine, Ankara multiplie les rencontres avec Moscou afin d'encourager les discussions entre les belligérants. Et c'est loin d'être le seul front où la Turquie souhaite être médiateur de paix. Le conflit Israël/Palestine s'ajoute aussi à la liste depuis août 2022.
Une solution diplomatique est-elle encore possible pour l’Ukraine ? Près de huit mois après le début de la nouvelle invasion russe, certains Etats veulent toujours croire en leur capacité à éviter le pire, à parler aux deux belligérants. Ainsi Recep Tayip Erdogan était-il à Astana au Kazakhstan la semaine dernière pour s’entretenir avec Vladimir Poutine qu’il fréquente assidûment depuis le début du conflit syrien et dont il se targue d’être « l’ami », tout en soutenant militairement l’Ukraine. Cette place de médiateur place la Turquie d’Erdogan en position de force sur la scène internationale, après plusieurs années de mise en retrait.
Mais la Turquie est-elle réellement neutre dans ce conflit ? Quel poids a-t-elle auprès de Vladimir Poutine, et quels bénéfices Recep Tayip Erdogan peut-il tirer de ce rôle affiché de médiateur ?
Pour répondre à ces questions et à bien d'autres, Julie Gacon reçoit Dorothée Schmid, chercheuse et responsable du programme Turquie contemporaine et Moyen-Orient de l'IFRI et Marc Pierini, ambassadeur de l’Union Européenne en Turquie de 2006 à 2011 et chercheur à Carnegie Europe à Bruxelles.
"L'important pour les turcs c'est de montrer qu'ils sont à disposition, d'autant qu'ils ont construit en 20 ans de présence de l'AKP au pouvoir un vrai savoir-faire sur la communication autour des médiations dans les dossiers dont personne ne veut et où ils proposent une troisième voix : ça s'est passé en Iran dans le passé, en Somalie aujourd'hui. Dans la guerre russo-ukrainienne, la Turquie est bien mieux placée que de nombreux autres intervenants internationaux pour faire avancer les choses mais cela ne signifie pas que c'est le moment de faire cette médiation", observe Dorothée Schmid.
"Etre médiateur signifie avoir discuté séparément avec les deux parties du conflit d'un texte/des modalités à agréer pour un cessez-le-feu ou un accord de paix, et d'organiser ensuite une réunion conjointe. Ceci ne s'est jamais passé pour la Turquie qui est avant tout dans une opération de facilitation : elle peut s'impliquer dans les protocoles, dans les agendas, dans les programmes etc. mais on est encore très loin de la médiation. Erdogan va continuer sur cette voie-là car c'est une façon de se positionner vis-à-vis des plus grandes puissances comme l'homme d'Etat qui peut faire des rapprochements, des accords", explique Marc Pierini à propos de la médiation turque dans le conflit qui oppose la Russie et l'Ukraine.
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