L’éolien offshore flottant dans sa dimension industrielle et technologique
L’Europe est à la pointe de l’éolien offshore sur fondation. Cette expérience réussie peut-elle être répliquée avec l’éolien flottant, qui offre de plus grandes perspectives de marché en levant la contrainte de profondeur des eaux ? Cette étude évalue les conditions de succès de cette nouvelle filière.
L'éolien offshore sur fondation fait déjà partie des sources d'énergie renouvelable matures, affichant des performances techniques et économiques remarquables. L'Union européenne (UE) constitue son premier pôle mondial de développement, avec 18,3 gigawatts (GW) installés à fin 2018. Cependant, les éoliennes sur fondation ne peuvent être installées que sur un plancher océanique de faible profondeur, une caractéristique peu fréquente.
La technologie éolienne offshore flottante s'affranchit de cette contrainte. Plusieurs pays européens[1] ont encouragé sa mise au point, en testant divers modèles de flotteurs, d'abord avec des prototypes, puis des démonstrateurs de taille industrielle, et aujourd'hui des fermes au stade pré-commercial atteignant chacune une capacité de plusieurs dizaines de mégawatts (MW). Chaque étape antérieure a permis de valider des réponses techniques aux redoutables difficultés à affronter, notamment pour assurer la plus grande stabilité possible à la turbine malgré la houle. Cinq modèles de flotteur ont franchi cette épreuve et se retrouvent aujourd'hui dans les divers projets au stade pré-commercial ; ces derniers visent à engranger de nouveaux progrès concernant l'ancrage et le raccordement électrique.
Les installations flottantes parvenues au stade pré-commercial utilisent des turbines classiques, celles qui équipent les éoliennes offshore sur fondation, et des flotteurs conçus par des entreprises détenant une longue expérience dans l'industrie pétrolière ou la construction navale. En parallèle, des modèles novateurs de flotteurs et turbines sont en cours d'essai et pourraient percer ultérieurement. Tous les projets bénéficient d'une aide financière, sous forme de subventions, prêts avantageux et achat à prix bonifié de l'électricité produite, car il s'agit de petites séries (trois à cinq machines), dont la nouveauté implique des primes de risque de la part des apporteurs de capitaux ainsi que des compagnies d'assurance.
Les éoliennes flottantes présentent un atout majeur : on les assemble au port et on les achemine ensuite sur site avec un remorqueur ordinaire, qui peut aussi les ramener à terre pour la maintenance lourde ou le démantèlement final. Cette spécificité nourrit la conviction que la filière deviendra compétitive lorsqu'elle bénéficiera des effets d'échelle engendrés par le lancement de séries longues et des effets d'apprentissage réduisant les coûts d'exploitation. Toutefois, les États européens qui ont soutenu le lancement de cette technologie jusqu'à nos jours hésitent à poursuivre leur effort à une plus grande échelle, dans une période de rigueur budgétaire et de compétition internationale aiguë, qui incite à contenir le prix de l'énergie.
L'Europe a acquis une avance sensible dans la maîtrise de l'éolien flottant, car elle détient un ensemble de compétences particulièrement précieuses dans ce domaine ; par ailleurs, l'éolien flottant reprend de multiples composants mis au point pour l'industrie pétro-gazière offshore et dont les chaines de valeur sont en partie européennes. Elle pourrait néanmoins se voir rattrapée ou dépassée par des pays concurrents qui ont perçu le potentiel de cette filière et veulent participer à son déploiement. Nos entreprises pionnières nouent tout naturellement des partenariats dans ces pays, étant soucieuses de valoriser rapidement leurs acquis et manquant de visibilité sur les débouchés en Europe.
L'examen du dossier laisse penser que la filière possède de fortes chances de prendre une place importante dans la transition énergétique à venir. Aucun État européen ne pouvant assumer seul les charges qu'implique le développement de cette technologie, il semblerait judicieux de mettre en place une « alliance européenne de l'éolien offshore flottant » propre à accélérer sa mise au point et à conforter la place occupée par l'industrie de notre territoire dans sa diffusion.
Contenu disponible en :
Régions et thématiques
ISBN / ISSN
Utilisation
Comment citer cette publicationPartager
Téléchargez l'analyse complète
Cette page ne contient qu'un résumé de notre travail. Si vous souhaitez avoir accès à toutes les informations de notre recherche sur le sujet, vous pouvez télécharger la version complète au format PDF.
L’éolien offshore flottant dans sa dimension industrielle et technologique
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analysesLes marchés du carbone peuvent-ils faire une percée à la COP29 ?
Les marchés volontaires du carbone (MVC) ont un potentiel élevé, notamment pour réduire le déficit de financement de la lutte contre le changement climatique, en particulier en Afrique.
Le secteur électrique indien à la croisée des chemins : relever les défis des distributeurs d'électricité
Le secteur électrique indien a besoin d’une réforme urgente.
L’approvisionnement énergétique de Taïwan : talon d’Achille de la sécurité nationale
Faire de Taïwan une « île morte » à travers « un blocus » et une « rupture de l’approvisionnement énergétique » qui mènerait à un « effondrement économique ». C’est ainsi que le colonel de l’Armée populaire de libération et professeur à l’université de défense nationale de Pékin, Zhang Chi, décrivait en mai 2024 l’objectif des exercices militaires chinois organisés au lendemain de l’investiture du nouveau président taïwanais Lai Ching-te. Comme lors des exercices ayant suivi la visite de Nancy Pelosi à Taipei en août 2022, la Chine avait défini des zones d’exercice faisant face aux principaux ports taïwanais, simulant de fait un embargo militaire de Taïwan. Ces manœuvres illustrent la pression grandissante de Pékin envers l’archipel qu’elle entend conquérir et poussent Taïwan à interroger sa capacité de résilience.
La difficile réorganisation des chaînes de valeur des matières premières critiques – regards sur les politiques européennes de réduction des risques
La demande de matières premières critiques devant, au minimum, doubler d’ici 2030 dans le contexte des politiques actuelles de transition énergétique, la concentration des approvisionnements en matières premières critiques (MPC) – et plus encore, des capacités de raffinage – dans une poignée de pays est devenue l’une des questions fondamentales au sein des discussions internationales, bilatérales et nationales. La position dominante de la Chine et les contrôles successifs des exportations de MPC (récemment le germanium, le gallium, les technologies de traitement des terres rares, l’antimoine) indiquent une tendance à l’instrumentalisation des dépendances critiques.