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Denis Bauchard :« La gouvernance autoritaire du prince héritier suscite des réactions très fortes »

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Quelles entraves à l’ouverture de la société saoudienne ? L’avis de Denis Bauchard, conseiller pour le Moyen-Orient à l’Institut français des relations internationales (IFRI). « L’Arabie saoudite est l’un des pays les plus connectés avec un accès libre et une pratique intensive des réseaux sociaux par la jeunesse. Mais de nombreux facteurs jouent contre la modernisation et l’ouverture. Outre la force du conservatisme religieux, les structures traditionnelles – la tribu et la communauté – font, par exemple, que le rôle de la femme n’est pas encore reconnu et que les mariages sont soumis à la décision du chef de famille.

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Par ailleurs, en dépit des progrès accomplis, le pays manque d’une véritable structure administrative efficace. Le prince héritier Mohammed Ben Salman semble mettre en place une sorte d’administration parallèle avec des jeunes Saoudiens diplômés d’universités étrangères. Mais il concentre tous les pouvoirs, y compris le contrôle des services de sécurité. Depuis quelques semaines, un vague d’arrestations a touché aussi bien les conservateurs que les islamistes libéraux et les réformistes. Leur dénominateur commun, c’est qu’ils n’ont pas soutenu la campagne de l’Arabie saoudite contre le Qatar.

Cette dérive autoritaire pourrait s’accroître en raison de la résistance des milieux conservateurs aux réformes économiques et sociales, comme l’ouverture de salles de spectacle et la construction prévue de parcs d’attractions, ouverts aux hommes et aux femmes. En revanche, Mohammed Ben Salman a le soutien des jeunes, en particulier ceux qui ont fait des études à l’étranger. Son objectif n’est pas d’évoluer vers une monarchie constitutionnelle, bien au contraire. Son modèle et mentor semble être Mohammed Ben Zayed, le prince héritier et homme fort d’Abou Dhabi.

La gouvernance autoritaire de Mohammad Ben Salman provoque des réactions très fortes dans la famille, qui était habituée à une gouvernance collégiale répartissant les prébendes entre les princes des différentes branches de la famille. Le pouvoir est aujourd’hui entre les mains d’un seul clan, les Sudaïri, et, parmi eux, la branche des Salmane. Un certain nombre de princes ont été mis en résidence surveillée, notamment le prince Ben Nayef. Cela ne peut que susciter de fortes tensions.

Mohammed Ben Salman réussira-t-il à mettre en œuvre ses réformes ? Il s’appuie sur d’autres jeunes princes de sa génération. Sa politique extérieure est plutôt un échec au Yémen et en Syrie. À l’intérieur, la réforme est indispensable : l’Arabie saoudite ne peut continuer à vivre en vase clos dans un monde totalement mondialisé. Mais elle n’est pas sans risque pour le pouvoir. La classe moyenne se développe et, à terme, la question se posera du décalage entre les réformes sociétales et l’absence de réforme politique. »

 

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Denis BAUCHARD

Intitulé du poste

Conseiller, Programme Turquie/Moyen-Orient de l'Ifri

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