Macron à Hambourg : France et Allemagne : « Le moteur de l’UE »
Lors de la rencontre entre le chancelier fédéral Olaf Scholz et le président français Macron, il sera question de discuter d’un travail commun encore plus étroit dans le cadre de la migration, de la crise énergétique, de la défense. Néanmoins, qu’en est-il du rapport actuel entre la France et l’Allemagne.
Rencontre avec deux expertes en science politique, chercheuses au sein de l’Institut français de relations internationales (IFRI), spécialistes des questions européennes et franco-allemande, Marie Krpata et Jeanette Süß.
ZDF : l’Europe a beaucoup de crises à gérer, une partie concerne le moteur franco-allemand. Quel est le statut de la relation entre les deux pays ?
Jeanette Süß : Je dirais tendue. Il est difficile de ne pas l’assumer, quand bien même la volonté politique persiste à vouloir améliorer la relation. La dernière visite d’Etat officielle, avec tout le caractère symbolique qu’elle incarne, avait dû être annulée par Emanuel Macron. Le Conseil des ministres franco-allemand, qui était en tout état de cause prévu, nous offre la possibilité de replonger dans un mode de travail propice à la coopération franco-allemande.
Marie Krpata : la France et l’Allemagne restent évidemment le moteur de l’Union européenne.
« Les autres pays de l’Union européenne attendent que nos deux pays s’accordent sur les questions centrales, mais aussi concernant les sujets de discorde ».
Avec la guerre en Ukraine, les débats se sont accélérés. Notamment sur les choix militaires, les accords dans le cadre des politiques énergétiques ou bien les questions économiques. Il est donc nécessaire de se rencontrer, de discuter conjointement et d’intensifier les dialogues.
ZDF : Vous avez évoqué les défis actuels. Selon vous, quels sont les thèmes qui coincent entre la France et l’Allemagne ?
Jeanette Süß : Les deux sujets principaux, qui reviennent à chaque fois, sont la défense et les politiques énergétiques. Néanmoins il y a aussi de grosses divergences dans la politique économique. Ce sont des sujets qui n’ont jamais cessé d’être source de disputes.
ZDF : La politique commune de défense a été remise à l’ordre du jour au plus tard avec l’arrivée de la guerre aux frontières de l’Europe. Cependant ces questions de défense entre la France et l’Allemagne n’ont pas fait beaucoup de bruit dernièrement.
Jeanette Süß : La France s’engage à promouvoir un système de défense et d’armement européen. Elle reproche à l’Allemagne d’avoir tendance à préférer la relation transatlantique. Par exemple par la livraison des avions de combat F35.
Malgré cela, il y a déjà des projets franco-allemands qui sont à disposition d’autres partenaires européens. Par exemple l’avion du futur ou le système de char MGCS. Au-delà de la complexité inouïe de ces projets, les ministres de la défense français et allemands ont réaffirmé leur volonté d’aller de l’avant.
Marie Krpata : Le système de défense anti-missile « Arrow 3 » est aussi un sujet de dispute. Berlin a déclaré miser dessus, et près de 18 autres Etats-membres de l’UE veulent rejoindre le projet basé sur des technologies israélienne et américaine.
« C’est ici que se recoupent deux visions : l’Allemagne, qui mise aussi sur des partenaires extra-européens, tandis que la France planifie le renforcement de la souveraineté européenne concernant les questions de défense ».
ZDF : Concernant les politiques énergétiques, les pays se sont-ils rapprochés ou bien les apparences sont-elles trompeuses.
Jeanette Süß : Dans tous les cas le Conseil des ministres franco-allemand arrive à un moment idéal. En effet, des pourparlers sont en cours au sein de l’Union européenne concernant une réforme du marché énergétique européen.
Les traditionnelles oppositions entre la France et l’Allemagne se manifestent évidemment à nouveau dans le cadre des conceptions de mix et d’approvisionnement énergétique. Incluant les différentes dépendances. D’un côté la France et son nucléaire puis de l’autre l’Allemagne et les énergies renouvelables.
Les tendances sont tellement avancées que la France et l’Allemagne incarnent des camps diamétralement opposés au sein de l’Union européenne.
« La France est un peu à l’écart du groupe sur les énergies renouvelables, ce qui a provoqué une certaine irritation au plus haut niveau politique ».
ZDF : Les débats concernant l’immigration polarisent fortement en Europe. Après une longue lutte, l’UE s’est finalement accordée sur une réforme du droit d’asile. Est-ce aussi grâce au moteur franco-allemand ?
Jeanette Süß : Concernant ce thème, la France et l’Allemagne n’ont pas des positions si différentes. La France est traditionnellement orientée vers l’Europe du Sud et les pays du Maghreb. L’Allemagne a une diaspora plus originaire des pays de l’Europe de l’Est.
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