Royaume-Uni/Union européenne : négociations à 28, pas à 27 contre un
David Cameron a révélé ses demandes de renégociation. Il est erroné d'y voir une négociation à 27 contre un, comme si souvent présenté. Les demandes britanniques pourraient avoir un impact fort sur les politiques européennes. Ce qui s'ouvre est une négociation européenne, où les concessions aux Britanniques joueront autant dans les esprits que les ramifications des décisions prises sur le fonctionnement politique et institutionnel de l'UE.
David Cameron a enfin dévoilé ses demandes. Bien qu’elles ne reflètent que des éléments déjà connus dans le débat sur le référendum britannique, la publication de cette liste est importante : le Premier ministre britannique sera évalué en fonction des demandes qu’il a formulées. Cela va générer des attentes. Surtout, cela crée une grille d’évaluation. Toutefois, la clarification des demandes du Royaume-Uni ne va pas pour autant faciliter les négociations, car ces demandes ne sont, pour la plupart, pas strictement britanniques, mais touchent l’ensemble des États-membres.
Depuis plusieurs mois, les partenaires européens du Royaume-Uni tannaient David Cameron de clarifier ses demandes. Les nombreuses visites effectuées par les ministres britanniques, notamment le chancelier de l’Échiquier, George Osborne et le ministre pour l’Europe David Lidington, ainsi que celles de David Cameron, ne donnaient souvent lieu qu’à des discussions de principe. Et sur le principe, tout le monde concède volontiers qu’il est important de « réformer l’Union européenne ».
Ces annonces : une concession du gouvernement
Les éléments de renégociation avaient émergé depuis plusieurs mois dans le débat, mais ils ne formaient pas une position claire et explicite du gouvernement. David Cameron avait ses raisons pour ne pas vouloir mettre ses demandes sur papier. On ne révèle pas ses cartes en pleine négociation. Bien que cette attitude soit classique d’une négociation, elle suscitait l’irritation des partenaires européens. En outre, le gouvernement craignait qu’une publication de cette liste ne devienne le bréviaire des eurosceptiques qu’ils utiliseraient à foison pour scruter ses succès et ses échecs.
La publication de cette liste est donc une concession. Tactiquement, elle dessert les intérêts du gouvernement. En effet, il avait engagé des négociations techniques depuis début septembre avec les institutions européennes, qui devaient se conduire dans la plus grande confidentialité. À l’issue de ces négociations devait commencer, à partir du Conseil européen de décembre, le processus de dialogue politique entre États-membres. Cet échéancier se trouve donc bousculé. Les optimistes, comme David Lidington, estiment que cela pourrait accélérer les négociations du fait que les demandes sont connues et qu’un accord à 28 pourrait ainsi être trouvé dès le Conseil de décembre – hautement improbable surtout vu le calendrier européen ultra chargé.
Quatre grands axes
David Cameron a résumé ses demandes en quatre grands axes : la gouvernance économique, la compétitivité, la souveraineté et l’immigration. Le niveau de détail varie en fonction des axes, mais dans tous les cas, les modalités de réforme sont relativement floues. Le seul point sur lequel le Premier ministre est totalement explicite est que ses demandes doivent amener à des réformes juridiquement contraignantes et irréversibles. Autrement dit, l’objectif in fine est que ces réformes soient inscrites dans les traités, bien que le gouvernement britannique ne parle plus qu’à demi-mot d’un changement de traité dans l’immédiat. Ainsi faudrait-il trouver d’autres mécanismes juridiques, tels que la signature de traités intergouvernementaux ou la rédaction de protocole, qui seront enregistrés auprès du secrétariat de l’ONU, en vertu de l’article 102 de la charte des Nations Unies, leur conférant ainsi une valeur juridique reconnue.
Axes de renégociation
|
Principaux éléments
|
Gouvernance économique
|
- Reconnaître que l'UE est une Union à plusieurs monnaies
- Garantir l'intégrité du marché intérieur
- Garantir la non-discrimination entre les membres de la zone euro et les nom-membres
|
Compétitivité
|
- Poursuivre l'achèvement du marché intérieur (notamment dans le numérique et les marchés des capitaux)
- Aller plus loin dans la réduction de la réglementation européenne
- Signer plus d'accords de libre échange
|
Souveraineté
|
- Une exemption d'une "union sans cesse plus étroite"
- Un "carton rouge" pour les parlements nationaux sur les propositions législatives européennes
|
Immigration
|
- Un régime plus strict de liberté de circulation des travailleurs pour les futurs pays entrants
- Instaurer une période de quatre ans pendant laquelle un employé, ressortissant européen, ne peut pas bénéficier des prestations sociales
- Interdire l'envoi des aides à l'enfant, lorsqu'ils résident à l'étranger
|
Poursuivez la lecture en téléchargeant le fichier :
Contenu disponible en :
Régions et thématiques
Utilisation
Comment citer cette publicationPartager
Téléchargez l'analyse complète
Cette page ne contient qu'un résumé de notre travail. Si vous souhaitez avoir accès à toutes les informations de notre recherche sur le sujet, vous pouvez télécharger la version complète au format PDF.
Royaume-Uni/Union européenne : négociations à 28, pas à 27 contre un
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analysesL’Inde en quête d’émancipation économique face à la Chine
En octobre 2024, la rencontre entre le Président chinois Xi Jinping et le Premier ministre indien Narendra Modi a amorcé un réchauffement entre les deux géants asiatiques. La forte dépendance économique de l’Inde vis-à-vis de la Chine a-t-elle joué un rôle dans ce dégel diplomatique ?
L’Indo-Pacifique face à Trump II. Dans l’étreinte brutale de l’oncle Sam
L’équipe du Centre Asie de l’Ifri présente dans cette note collective une évaluation synthétique et non exhaustive des relations qui se dessinent entre les États-Unis sous l’administration Trump II et certains des principaux acteurs de l’Indo-Pacifique.
France-Philippines : renforcer la coopération maritime
Une coopération maritime renforcée entre la France et les Philippines, deux nations de l'Indo-Pacifique, pourrait s’appuyer sur leurs intérêts communs, leurs besoins et leur expertise en matière de sécurité et de gouvernance maritimes, tout en ouvrant la voie à un rapprochement stratégique.
La coopération de sécurité maritime dans le Pacifique
La France joue un rôle important dans la sécurité maritime du Pacifique, notamment à travers la participation active de ses territoires d'outre-mer et la contribution de ses forces armées stationnées aux initiatives de coopération régionale.