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Serbie: cap 2014 ?

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Serbie: cap 2014 ?
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Le 22 décembre 2009, la Serbie a déposé sa candidature en vue d'une adhésion à l'UE. Le contexte y était favorable : quelques jours auparavant, la libéralisation des visas avait été mise en place pour les citoyens de Serbie, de l'Ancienne République Yougoslave de Macédoine (ARYM) et du Monténégro. 

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De plus, l'accord intérimaire de libre-échange entre la Serbie et l'UE signée en 2008 est entré en vigueur fin 2009. La Serbie affirme ainsi son choix pour l'UE, et ce, dix ans environ après la fin des conflits qui opposèrent les républiques de l'ex-Yougoslavie et qui firent d'elle l'accusée principale. Cette nouvelle positive ne doit pas cacher pour autant les défis que cet Etat doit relever sur ce chemin de l'adhésion, pour sa stabilité et pour celle de la région. Le plus grand Etat des Balkans occidentaux est-il prêt à tracer sa route vers l'UE ?

La Serbie en route vers l'UE

Permettons-nous un petit regard en arrière : l'engagement communautaire de la Serbie a débuté dans les années 2000, pour être affaibli juste après, dans le contexte de tumultes politiques. Une coalition du Parti démocratique de l'actuel Président Tadic (DS, Demokratska stranka) et du Parti démocratique de Serbie de Kostunica (DSS, Demokratska stranka Srbije) avait permis la destitution de Milosevic en 2000. Mais une fois son but atteint, la coalition éclata à cause de nombreuses divergences notamment l'itinéraire que la Serbie avait à prendre vers l'UE et la façon de traiter la question du Kosovo. Ces polémiques fragilisèrent la stabilité politique en Serbie pendant plusieurs années.
Telle une obligation historique après son échec lors des guerres yougoslaves, l'UE a mis en place de nombreuses structures censées stabiliser la région. A travers divers programmes comme le processus de stabilisation et d'association mais également une aide financière conséquente à travers les programmes CARDS et IPA[1], et par le biais de nouvelles institutions telles que la Communauté de l'Energie, l'UE tente de promouvoir stabilité et rapprochement au sein de cette région, et de transmettre valeurs et standards démocratiques.
En avril 2008, l'Accord de Stabilisation et d'Association (ASA) entre la Serbie et l'UE fut signé suite à une meilleure coopération avec le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) et afin d'apaiser les tensions après la déclaration d'indépendance du Kosovo.
Sésame pour entamer une association formelle avec l'UE et à terme une possible adhésion, l'ASA constitue une forme nouvelle de relations contractuelles proposée par l'Union en échange de conditions politiques et économiques déterminantes pour celle-ci[2]. Insistons ici sur le fait que l'ASA n'est toujours pas entré en vigueur en raison de l'opposition néerlandaise.

Etat des ASA dans la région[3]

La Croatie a signé son ASA en 2001qui est entré en vigueur en 2005. L'UE l'a acceptée comme candidate en 2004 ;
L'Ancienne République Yougoslave de Macédoine (ARYM) a signé son ASA en 2001 qui est entré en vigueur en 2004. L'UE l'a acceptée comme candidate en 2005.
Les autres Etats des Balkans occidentaux sont considérés comme candidats potentiels. L'Albanie a vu son ASA entrer en vigueur en avril 2009 et a déposé sa candidature d'adhésion le même mois ;
La Bosnie-Herzégovine a signé son ASA en juin 2008, celui-ci entrera en vigueur dès que son processus de ratification sera clôturé ;
Le Monténégro a signé son ASA avec l'UE en octobre 2007 et comme la Bosnie-Herzégovine, doit attendre la fin du processus de ratification, il a néanmoins soumis sa candidature d'adhésion en décembre 2008 ;
Le Kosovo n'a encore ni signé d'ASA ni fait de demande d'adhésion, la complexité de son statut ne permettant pas encore de progresser vers une voie de ce type.


Les positions au sein de l'UE

Dans sa démarche de dépôt de candidature, la Serbie a pu trouver un soutien en Italie, en Espagne et en Suède. L'Espagne, qui assume actuellement la présidence tournante de l'UE, est un des rares Etats-membres à ne pas avoir reconnu l'indépendance du Kosovo, dans le souci de ne pas créer de précédent avec le pays basque.

Les Pays-Bas représentaient le frein le plus important au sein de l'UE à la candidature d'adhésion. Présents à Srebrenica au moment des pires atrocités, La Haye est la plus opposée à la candidature d'adhésion de la Serbie à l'UE tant que celle-ci ne coopère pas activement avec le Tribunal.

La Serbie n'est pas le seul Etat de la région à rencontrer des difficultés dans son processus d'intégration avec certains Etats-membres. Rappelons ici le litige entre la Slovénie et la Croatie au sujet de leur frontière commune ou encore le cas de l'Ancienne République Yougoslave de Macédoine qui est freiné par la Grèce en raison de son appellation.

La plupart des autres Etats-membres étaient également prudents au sujet de la candidature serbe, voulant éviter toute précipitation face à l'opinion publique, hostile à tout autre élargissement.

D'autant que d'autres Etats sont déjà candidats reconnus pour l'adhésion : au-delà des Balkans occidentaux, la Turquie et l'Islande allongent la file d'attente aux portes bruxelloises. Or, la " fatigue de l'élargissement " se fait ressentir depuis 2004. C'est pour cette raison que l'UE, souhaitant encourager Belgrade dans ses progrès tout en évitant toute précipitation, a cherché à promouvoir comme sorte d'alternative, l'accord intérimaire de libre-échange fin 2009. Mais la Serbie ne s'est pas laissé dissuader de son dépôt.

Défis à relever

Malgré ses avancées, quatre défis sont à relever par la Serbie dans les années à venir. Sont à mentionner la coopération avec le TPIY et la résolution du statut du Kosovo ainsi que la lutte contre la corruption, et bien entendu, l'implémentation de l'acquis communautaire.

La coopération avec le TPIY : condition sine qua non

La coopération avec le TPIY est la première condition que la Serbie doit remplir. Expressément notifiée dans l'ASA, cette coopération a eu des hauts et des bas et constitue un véritable obstacle entre la Serbie et l'UE. Sous le gouvernement Djindjic[4], Milosevic a été arrêté en 2001 et est mort avant la fin de son procès. L'ancien leader politique des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic, arrêté en 2008 et dont le procès a débuté à La Haye il y a peu, n'est pas le dernier des criminels de guerre serbes attendus au TPIY. En effet, le Général Mladić, ex-commandant en chef de l'armée de la République serbe de Bosnie et Goran Hadžić, l'ancien responsable des Serbes de Croatie n'ont toujours pas été arrêtés. Par la voix de son Procureur, le TPIY a fait savoir que la Serbie avait engagé de réels progrès dans la traque des anciens belligérants encore recherchés, ce qui a permis son rapprochement avec l'UE (pour de plus amples informations : http://www.icty.org/). Tant pour tracer sa route vers l'UE que pour tourner la page avec son passé et rétablir de bonnes relations avec ses voisins, les autorités serbes se doivent de traduire ces derniers criminels de guerre devant la justice internationale. Le gouvernement serbe se dit optimiste quant à l'arrestation de Mladic en 2010.

L'enjeu du Kosovo

Le deuxième dossier clef pour le rapprochement UE-Serbie est la question du Kosovo.

Cette question est d'autant plus complexe à résoudre qu'elle divise à la fois sur le plan régional -la Bosnie-Herzégovine ne l'a pas reconnu, mais la plupart des Etats voisins de la Serbie l'ont reconnu-, sur le plan européen -22 Etats l'ont reconnu mais l'Espagne qui assure actuellement la présidence tournante de l'UE, Chypre, la Slovaquie, la Grèce et la Roumanie n'ont pas reconnu le Kosovo- et sur un plan international -les Etats-Unis ont reconnu l'indépendance mais pas la Russie. Cette épineuse question devra trouver une réponse issue d'un subtil compromis afin que la région n'en soit pas déstabilisée et ne se trouve à nouveau gangrenée. Il faut espérer que le nouveau Haut représentant de l'Union aux affaires étrangères et la dynamique engendrée par le Traité de Lisbonne seront en mesure de permettre à l'Union de développer tout son potentiel diplomatique et politique pour apaiser le climat dans le processus plus large d'intégration.

Corruption et crime organisé

Le troisième défi à relever est le progrès dans la lutte contre la corruption et le crime organisé, la réforme du pouvoir judiciaire, le renforcement des capacités administratives et le développement d'une bonne gouvernance.

Dans le dernier baromètre de Transparency International, l'indice de perception de la corruption classe la Serbie à la 83ème place, entre Trinidad-et-Tobago et le Salvador, loin derrière la plupart de ses voisins[5]. La corruption perçue en Serbie est surtout liée aux partis politiques, comme c'est le cas également en Bosnie-Herzégovine.

L'implémentation de l'acquis communautaire

Depuis 2002, la Commission européenne publie chaque année un rapport des progrès de chaque Etat de la région des Balkans occidentaux. Ce rapport pointe les avancées réalisées en matière d'implémentation des standards européens et de la législation adoptée. Le dernier rapport de progrès de la Serbie, sorti en octobre 2009 est disponible à la page suivante : http://ec.europa.eu/enlargement/pdf/key_documents/2009/sr_rapport_2009_en.pdf.


Après la Croatie et l'Islande ?

2014, est-ce réaliste ?

Lors de l'annonce de dépôt de la candidature de la Serbie, son Président, Boris Tadić, s'est montré optimiste en annonçant 2014 comme un objectif à atteindre pour son pays. La Serbie deviendra(it) alors le 30ème Etat membre au sein de l'UE.

Si la " fatigue de l'élargissement ", élément indépendant des efforts de la Serbie, pourrait s'avérer un facteur de retardement, les quatre défis que nous venons de mentionner dépendent directement de celle-ci.

Selon différentes estimations, la Serbie pourrait intégrer l'UE entre 2014 et 2018 si elle garde l'élan actuel dans ses réformes. Le dépôt de sa candidature représente un symbole fort mais néanmoins incomplet sans l'entrée en vigueur de l'ASA.

Le défi de devenir numéro trente reste donc entier.

Pour conclure, son intégration à l'UE est tributaire, à court terme, de la traduction de Mladić et de Hadžić en justice et, par la suite, de l'étroite coopération entre Bruxelles et Belgrade dans l'implémentation de l'acquis communautaire. La dimension de l'intégration régionale de l'Europe du Sud-Est sera une première étape indispensable sur cette voie.

 


[1] Le programme CARDS, en vigueur de 2000 à 2006 avait pour but de fournir une assistance communautaire aux pays de l'Europe du Sud-Est dans le cadre de leur participation au processus de stabilisation et d'association avec l'UE. Le programme IPA, pour Instrument for Pre-Accession Assistance est l'instrument financier de la CE pour le processus de pré-accession des pays souhaitant rejoindre l'UE, sur la période 2007-2013.
[2] Correspondant aux traités d'association mis en place par l'UE dans ses relations avec les pays d'Europe centrale et orientale, de tels accords soulignent l'engagement des signataires de parvenir, au terme d'une période de transition, à une association formelle avec l'UE. Ils constituent la formule qui régit les relations entre l'UE et les Balkans occidentaux
[3] Pour de plus amples informations au sujet de l'ASA : Commission européenne, DG Elargissement, http://ec.europa.eu/enlargement/countries/index_en.htm
[4] Ce même Djindjic a été assassiné peu de temps après.
[5] Transparency International, Corruption Perceptions Index 2009, disponible sur internet: http://www.transparency.org/policy_research/surveys_indices/cpi/2009/cpi_2009_table et http://www.transparency.org/policy_research/surveys_indices/gcb/2009

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