Les mots, armes d'une nouvelle guerre ?
Les Mots armes d’une nouvelle guerre rappelle une vérité souvent oubliée : les mots tuent. Ils préparent l’action militaire et lui donnent un sens. Alors que chaque événement retentit désormais dans le monde entier, répercuté de smartphone en smartphone ou d’ordinateur en ordinateur, tout acte de guerre tend à devenir un acte de communication, et inversement. Les états-majors l’ont aujourd’hui bien compris et se saisissent de cette guerre des récits faite d’armes immatérielles pour intimider des ennemis, rassurer ou galvaniser des opinions publiques chauffées à blanc par le flot d’images reçues sur les réseaux sociaux.
La guerre d’Ukraine, commencée en 2014 avec l’annexion de la Crimée, est une rupture dans l’ordre international. Plus encore que les actes, ce sont les discours qui ont préparé le terrain. En prenant Vladimir Poutine au mot, l’autrice montre que l’idéologie est au cœur des erreurs d’analyse et des conséquences politiques lourdes qui en découlent. En nous plongeant dans l’affrontement russo- ukrainien, Amélie Férey dévoile les mécanismes de manipulation de l’information, la polarisation de l’espace public, et la guerre des images – autant de thématiques que l’on retrouve aujourd’hui à l’œuvre en Israël et Palestine.
Cet essai extrêmement clair et charpenté propose une analyse critique de la guerre russo- ukrainienne en l’articulant autour de quatre questions : comment penser la guerre, comment la justifier, comment maitriser les moyens d’information et de communication pour imposer son récit ; et comment assoir sa vérité sur celle de l’autre.
Le propos parcourt ainsi un large champ de questions, de la construction d’un récit national aux réponses du droit international, en passant par le phénomène de la « confusion des genres », qui voit journalistes, chercheurs, experts militaires, leaders politiques, influenceurs, usagers des réseaux sociaux s’emprunter mutuellement leurs mots et leurs cadrages.
Cet essai ne se contente pas de décrypter le passé ; il prépare aussi aux conflits futurs. Alors que plusieurs gouvernements européens – dont la France justifient d’immenses dépenses militaires en invoquant un « retour de la guerre », Les Mots armes d’une nouvelle guerre offre une perspective critique sur l’instrumentalisation du conflit en Ukraine pour légitimer ces dépenses, tout en questionnant la stratégie de défense française. En comprenant les mécanismes de l’« arsenalisation des récits », il devient possible de les contrer et de redéfinir notre approche des conflits modernes.
_________________
Dr. Amélie Férey est chercheuse au sein du Centre des Études de sécurité et responsable du Laboratoire de recherche sur la défense (LRD) de l'Institut français des relations internationales (IFRI).Elle est enseignante à Sciences Po Paris et à Polytechnique. Ses publications traitent des thèmes suivants : l'éthique et le droit de la guerre, le conflit israélo-palestinien, la légitimation de la force armée.
>Voir détails sur l'ouvrage sur le site du Robert
Contenu aussi disponible en :
Thématiques et régions
Utilisation
Comment citer cette étudePartager
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analysesEntre ambitions industrielles et contribution à l'OTAN, les défis de la European Sky Shield Initiative
La guerre en Ukraine et la reconnaissance de la Russie comme principale menace pour la sécurité européenne poussent les Alliés à réinvestir dans leur défense sol-air et antibalistique.
Après la mort de Nasrallah, quelle stratégie régionale pour l’Iran ?
Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah, a été tué dans une frappe israélienne à Beyrouth le 27 septembre. La milice et son dirigeant étaient considérés comme le fer de lance de l’Axe de la Résistance, cette coalition de groupes miliciens majoritairement chiites qui sont au coeur de la stratégie régionale de l’Iran.
Devenir secrétaire général de l'OTAN. Entre critères objectifs, coutumes et homogénéité
Après dix ans à la tête de l’OTAN de 2014 à 2024, un record de longévité dû au contexte particulier de la guerre en Ukraine, le Norvégien Jens Stoltenberg quitte ses fonctions de secrétaire général. Son successeur, choisi par les chefs d’État et de gouvernement des États membres, sera Mark Rutte, Premier ministre des Pays-Bas pendant près de quatorze ans. Cette nomination invite à questionner les critères et les logiques de sélection des secrétaires généraux, alors que de nombreuses études démontrent l’importance significative du secrétariat international et le rôle croissant du secrétaire général dans le fonctionnement interne de l’Alliance.
EUDIS, HEDI, DIANA : que se cache-t-il derrière trois acronymes de l'innovation de défense ?
En Europe, alors que la guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine montre peu de signes d'apaisement, un écart persistant subsiste entre les besoins en matière de sécurité et les dépenses de défense. Conformément à un engagement de 2006, inscrit lors du sommet de l'OTAN au Pays de Galles en 2014, les membres de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) doivent consacrer au moins 2 % de leur produit intérieur brut (PIB) national à la défense, dont 20 % doivent être investis dans l'équipement ainsi que la recherche et le développement. En 2024, seuls 23 Alliés sur 32 devraient atteindre ou dépasser cet objectif, bien qu'il s'agisse d'une amélioration notable par rapport aux trois pays en 2014. Ce total inclut les États-Unis (US), qui consacrent 3,38 % de leur PIB à la défense, représentant près de 70 % de l'ensemble des dépenses de défense des membres de l'OTAN.