L'Allemagne et les expulsés : quel centre pour quelle mémoire?
Entre 1944 et 1950, 12,5 millions d'Allemands ont dû quitter leur foyer, situé dans les anciens territoires orientaux du Reich allemand, en Tchécoslovaquie, en Hongrie ou dans l'Europe du Sud-Est. Les questions portant sur leur fuite ou leur expulsion sont devenues, ces dernières années, l'objet d'un vif intérêt en Allemagne. Si les déplacements de populations dans l'après-guerre ont été explorés dans de nombreux travaux scientifiques depuis 1989, le pouvoir d'expliquer ce chapitre sombre de l'histoire du XXe siècle tend à présent à échapper aux historiens.
A ses débuts, la RFA a été imprégnée de l'expérience de la fuite et de l'expulsion. Puis, pour un certain nombre de raisons ici expliquées, cette thématique a pratiquement disparu des milieux de la recherche. Après être sortie de la Guerre froide en 1989, la RFA peut se souvenir de la souffrance des Allemands ayant dû quitter leur foyer à la fin de la Seconde Guerre mondiale et dans l'immédiat après-guerre. La question qui se pose n'est pas si cela se fait, mais comment il se fait, et quel en est le motif structurant.
La Fédération des expulsés revendique depuis plusieurs années l'accord politique pour créer un Centre contre les expulsions à Berlin. Il s'agit d'une tentative de muséaliser le thème de la fuite, de l'expulsion et des déplacements de populations et de le positionner, d'une manière ostentatoire, dans la culture de la mémoire de la RFA. Le projet a suscité des propositions alternatives a été à l'origine d'un débat public très controversé, notamment en Pologne. A l'heure actuelle, la question de savoir s'il est pertinent de créer un Centre contre les expulsions, sa localisation ainsi que sa couverture thématique et géographique est toujours en suspens.
Daniela Heimerl est rédactrice au Courrier des pays de l'Est à la Documentation française.
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