Le Trans Saharan Gas Pipeline : Mirage ou réelle opportunité ?
Le continent africain possède 8 % des réserves gazières du monde. Sa relative faiblesse économique et l’absence presque totale de réseaux gaziers entraînent une consommation intérieure très réduite (quasi nulle en dehors de l’Algérie et de l’Égypte) qui permet une importante capacité exportatrice de son gaz. Relier l’Afrique subsaharienne à l’Union européenne (UE) par un gazoduc est donc un projet économique assez logique.
Les deux blocs intéressés en discutent avec de plus en plus d’intensité depuis le début des années 2000. La stratégie paraît à priori évidente. La zone européenne compte trois importants producteurs de gaz : Norvège (non-membre de l’UE mais associée étroitement à sa politique énergétique), Grande-Bretagne et Pays-Bas, avec respectivement une production de 99,2, 69,5 et 67,5 milliards de mètres cubes en 2008. Toutefois, la production de la Norvège et des Pays- Bas va commencer à décroître dans quelques années ; celle de la Grande-Bretagne diminue déjà de façon significative depuis 2000 et les Britanniques importent actuellement un tiers de leur gaz pour leur consommation domestique (93,9 milliards de mètres cubes en 2008). Les importations de l’UE vont donc mathématiquement croître progressivement. Or, la crainte d’une dépendance au gaz russe (aujourd’hui de 25 % en moyenne parmi les 27) dans un futur proche conduit l’Union à vouloir diversifier ses sources d’approvisionnement. Si aucune diversification n’est mise en place, la Russie pourrait approvisionner quelque 70 % du marché européen (27 pays) d’ici à 2050. La solution de multiplier les usines de regazéifications pour importer du gaz naturel liquéfié (Liquefied Natural Gas, LNG) est actuellement clairement privilégiée par plusieurs pays de l’Union : France, Italie, Espagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Pologne. Les pays du golfe Persique, l’Égypte, l’Algérie et les États-Unis approvisionneront ces nouvelles usines. Le Trans Saharan Gas Pipeline (TSGP) qui relierait le Nigeria au Niger et à l’Algérie, elle-même connectée à l’Espagne et à l’Italie par des gazoducs existants ou en construction, pourrait s’avérer un choix supplémentaire d’approvisionnement de long terme. Cependant, si ce gazoduc de 4 128 km considéré par le NEPAD (New Partnership for Africa’s Development) comme prioritaire n’est pas un rêve, ni même un défi du point de vue technique, plusieurs éléments financiers, sécuritaires et géopolitiques vont devoir trouver une solution avant une hypothétique prise de décision formelle de développement dans les prochaines années.
Benjamin Augé est doctorant à l’Institut français de géopolitique, université Paris 8.
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