Angela Merkel quitte le pouvoir en Allemagne, avec un bilan en partie inattendu
En seize ans à la Chancellerie, Angela Merkel a marqué l'opinion avec des décisions sur des sujets où elle n'était pas forcément attendue.
ALLEMAGNE - Clap de fin. Angela Merkel tirera sa révérence dimanche 26 septembre à l’issue des élections fédérales après quatre mandats successifs à la tête de l’Allemagne. D’elle, ces concitoyens retiendront sa longévité et sans doute son calme, sa rigueur ou encore ses mains en losange... mais aussi d’autres choses surprenantes.
30 novembre 2005, au Bundestag à Berlin: “Nous voulons créer les conditions pour que l’Allemagne soit dans le top 3 en Europe dans 10 ans”, déclare la nouvelle chancelière Merkel.
Elle n’aura pas eu dix ans, mais presque seize pour mener à bien ses missions. C’est chose faite, au moins en partie. “Si l’objectif était de faire de l’Allemagne une puissance plus forte, avec un chômage plus bas, oui elle l’a atteint, même si elle a surtout bénéficié des réformes de son prédécesseur”, analyse pour Le HuffPost Paul Maurice, chercheur au Comité d’études des relations franco-allemandes (Cerfa) à l’Institut français des relations internationales.
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Merkel la stratège: le nucléaire et le mariage pour tous
Angela Merkel est entrée dans l’arène politique en 1990, en même temps que les premières élections de l’Allemagne réunifiée. Aussi, lorsqu’en 2011 elle doit gérer la panique ambiante après la catastrophe nucléaire de Fukushima, elle a déjà vingt et un ans d’expérience politique derrière elle. Il lui faudra bien ça pour réussir à tirer profit d’une décision à rebours de ses positions antérieures: faire sortir l’Allemagne du nucléaire au 31 décembre 2022.
En 2002, Angela Merkel fait partie de ceux qui critiquent la décision de Gerhard Schröder de renoncer progressivement à cette énergie. En septembre 2010, elle fait prolonger la durée de vie des centrales allemandes, ce qui satisfait son parti la CDU (Union chrétienne-démocrate d’Allemagne), plutôt favorable à l’atome.
- “C’est une stratégie politique très claire. Elle a mis la loi à l’ordre du Bundestag lors de la dernière session du Parlement en juin 2017, juste avant les élections en septembre. Le SPD et les Verts avaient pour objectif de faire de cette thématique un thème de campagne pour se positionner et se démarquer de la CDU sur ces questions”, explique Paul Maurice. Angela Merkel leur a donc grillé la politesse, tout en ménageant son propre parti conservateur avec son vote contre.
Merkel la pragmatique : la mutualisation de la dette
La politique budgétaire d’Angela Merkel aurait pu se résumer en un mot: la rigueur, la rigueur et encore la rigueur, au point de sanctionner les mauvais élèves de la zone euro. La Grèce en a fait les frais en 2012. Mais la pandémie de coronavirus aura eu raison de cette doctrine économique. Angela Merkel est contrainte de revoir sa position et de soutenir l’idée d’une dette commune.
- “C’est vraiment un revirement de la part de l’Allemagne, certes sous pression française et européenne et avec la médiation de Von der Leyen. Merkel l’accepte par pragmatisme”, selon le spécialiste de l’Allemagne Paul Maurice.
Merkel l’humaine : la crise des réfugiés
- “Si on regarde d’une manière générale, je pense que ce qu’on retiendra d’elle, la chose peut-être la plus marquante, c’est l’accueil des réfugiés” en 2015, estime Paul Maurice.
En août de cette année-là, Angela Merkel se dit prête à accueillir une grande partie des milliers de personnes qui errent sur les routes de l’Europe, après avoir fui la Syrie pour une grande partie d’entre eux. “Wir schaffen das!” (“On y arrivera!”), martèle la chancelière.
- “On dit souvent que c’est sa décision la plus sincère, la plus réfléchie et la plus humaniste. Cela s’explique peut-être par sa formation, le fait qu’elle vienne de l’Est de l’Allemagne et qu’elle comprend peut-être plus que d’autres responsables politiques le fait de fuir son pays pour des raisons politiques, sociales et/ou économiques. Peut-être aussi que cela s’explique en partie par son humanisme chrétien, son éducation protestante, dans l’accueil des autres… Tout cela a pu aussi jouer”, analyse Paul Maurice.
Après seize ans aux commandes de l’Allemagne, Angela Merkel peut donc se réjouir de laisser un pays en meilleure santé économique, et avec des progrès notables sur les questions sociétales. Son bilan n’est cependant pas sans tâche et pêche particulièrement sur les questions environnementales. Un autre reproche peut aussi lui être fait: celui de n’avoir pas su préparer sa succession, laissant la porte ouverte à toutes les surprises à quelques jours du scrutin.
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