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Chemin diplomatique semé d'embûches pour la cheffe de l'opposition bélarusse

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citée par AFP/

  Challenges
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Novice en politique il y a quelques mois, la cheffe de file de l'opposition bélarusse Svetlana Tikhanovskaïa a rejoint la première ligue diplomatique européenne au risque de miner sa propre cause, estiment les analystes.

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Après avoir rencontré le président français Emmanuel Macron cette semaine, l'opposante, qui revendique la victoire à l'élection présidentielle au Bélarus en août, devrait rencontrer prochainement la chancelière allemande Angela Merkel.

Ces rencontres très médiatisées font partie d'une campagne centrée sur les dirigeants européens, destinée à faire pression sur le président Alexandre Loukachenko, pour qu'il organise de nouvelles élections.

Pour Tatiana Kastouéva-Jean, responsable du Centre Russie/NEI à l'Institut français des relations internationales, cette voie pourrait s'avérer "dangereuse" et "géopolitiser" le conflit au Bélarus. "Tikhanovskaïa cherche à les impliquer (leaders occidentaux) pour faire pression sur la Russie en pensant que c'est le bon moyen pour changer les choses", alors que ces rencontres peuvent être considérées "comme une provocation par la Russie et Loukachenko", a-t-elle déclaré à l'AFP.

L'inquiétude est partagée par des diplomates. Après sa rencontre avec M. Macron cette semaine à Vilnius, une source diplomatique française a estimé qu'"il ne faut pas que Mme Tikhanovskaïa soit une icône occidentale mais plutôt qu'elle soit une icône bélarusse".

Selon Anna Colin Lebedev de l'Université Paris-Nanterre, les entretiens avec les dirigeants occidentaux ont donné à Svetlana Tikhanovskaïa une plus grande légitimité mais sont "une arme à double tranchant" puisqu'elles peuvent positionner l'opposition bélarusse comme pro-européenne.

En même temps, l'opposition n'avait guère le choix suite au soutien apporté à M. Loukachenko par le président russe Vladimir Poutine.

"C'est la Russie qui a fait que le seul interlocuteur possible pour les Bélarusses dans la communauté internationale devient le voisin européen", a estimé Mme Colin Lebedev.

L'opposante revendique la victoire à l'élection du 9 août, affirmant que le président Loukachenko a truqué le scrutin pour prolonger son règne de 26 ans.

Mme Tikhanovskaïa a trouvé refuge en Lituanie, pays membre de l'UE et de l'Otan, où elle a fui dans les jours qui ont suivi le vote, au milieu de manifestations anti-gouvernementales sans précédent qui continuent à secouer l'ancienne république soviétique.

Bien que l'UE ne reconnaisse pas le résultat des élections, elle n'est pas allée jusqu'à reconnaître sa victoire et fait plutôt pression pour organiser de nouvelles élections en présence des observateurs internationaux.

Les efforts de l'opposante ont suscité le mépris de M. Loukachenko et de Moscou.

Le dirigeant bélarusse, cité par sa porte-parole, a accusé M. Macron d'accorder trop d'importance à Mme Tikhanovskaïa "parce qu'elle est une femme" et lui a prédit "des ennuis dans sa vie personnelle". Le chef du Kremlin a estimé que le Bélarus se trouvait dans une "situation difficile" et faisait face à "une pression extérieure sans précédent".

"Apparemment, le président français soutient cette citoyenne bélarusse", a affirmé pour sa part le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.

Plus réservée que M. Macron, la chancelière allemande a estimé mercredi que M. Loukachenko devrait engager "un dialogue avec les gens (...) sans interférence de l'Est ou de l'Ouest".

Mme Tikhanovskaïa, qui n'a rejoint la campagne pour l'élection présidentielle qu'après l'arrestation de son mari blogueur qui tentait de s'inscrire comme candidat, a indiqué qu'elle n'avait pas d'ambitions politiques au-delà d'un nouveau scrutin.

Cette ancienne enseignante d'anglais de 38 ans a déclaré qu'elle ne se porterait pas candidate à l'élection, qu'elle souhaite voir se tenir d'ici la fin de l'année.

"Ce qui a fait également son attrait, c'est sa volonté de ne pas s'engager dans une carrière politique", estime Anna Colin Lebedev.

"Elle est ambassadrice et porte-parole mais pas leader", il n'y a pas "de culte de la personnalité de Tikhanovskaïa", a-t-elle estimé.

Cette opinion est confirmée par les manifestants. Pour Alexandre Grouzdilovitch, un travailleur de l'industrie technologique, les rencontres avec les dirigeants occidentaux étaient opportunes pour un mouvement qui risquait de glisser au bas des priorités des dirigeants mondiaux.

"C'est bien, c'est un signe positif pour nous", a-t-il déclaré, tout en soulignant que "pour se débarrasser de Loukachenko, il faut parler à Poutine".

Pour une autre manifestante à Minsk, Anna Potapenko, "plus la communauté internationale se concentre sur le Bélarus... mieux c'est. Toute implication d'une tierce partie est la bienvenue!"

Lire l'article intégral sur le site de Challenges

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Tatiana KASTOUÉVA-JEAN

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Directrice du Centre Russie/Eurasie de l'Ifri