En Syrie, les forces pro-régime très durement touchées dans l'Est
En Syrie, 52 combattants pro-régime ont été tués lors d’un raid aérien dans la nuit du dimanche 17 au lundi 18 juin. La coalition menée par les États-Unis nie toute responsabilité, malgré les accusations de Damas.
Des frappes sur les positions du régime dans la zone d’Al Hari, dans l’est de la Syrie, ont tué au moins 52 combattants du camp Assad, notamment irakiens, dans la nuit du dimanche 17 au lundi 18 juin. L’agence d’information officielle syrienne SANA, soutien du régime de Bachar Al Assad, a rapidement attribué ces frappes aériennes à la coalition menée par les États-Unis, une information reprise par les médias locaux.
Ainsi, le journal Syria Times titrait lundi 18 juin « La coalition illégale menée par les États-Unis a attaqué les positions de l’armée syrienne ». Le Hachd al-Chaabi, organisation paramilitaire irakienne se battant aux côtés de l’armée syrienne, a également accusé la coalition, alors qu’elle avait nié toute implication dans l’attaque.
Une situation confuse
Les forces démocratiques syriennes (FDS), soutenues par les États-Unis, et le régime syrien, appuyé par la Russie, mènent deux offensives distinctes contre Daech dans la région d’Al Hari, située dans la province orientale de Deir Ezzor.
En effet, les FDS se battent pour chasser les djihadistes de Daech de villages situés sur les rives de l’Euphrate, à quelques kilomètres de la frontière irakienne, tandis que les forces gouvernementales occupent les terres à l’ouest du fleuve. Afin d’éviter tout conflit entre les deux parties, une zone dite de « déconfliction » avait été instaurée par les Russes et les Américains lors de la reconquête de Deir Ezzor.
- « On arrive à l’os du problème, à la situation post-Daech », confie Dorothée Schmid, spécialiste du Moyen-Orient et chercheur à l’IFRI. Selon elle, « il n’est pas évident qu’on arrive à un affrontement ». « La discipline des combattants est capitale pour éviter une escalade de la violence » ajoute-t-elle. « Or il s’agit de mouvements peu structurés avec une multiplicité d’acteurs ».
Du côté américain aussi, les niveaux d’action sont nombreux.
- « Entre la Maison-Blanche, qui souhaite se retirer, la CIA qui entreprend des actions secrètes, et d’autres entités, il y a une multitude de volontés politiques qui augmentent la possibilité de microconflits et d’escalade de la violence », Dorothée Schmid. « Des logiques de vengeance s’installent et il est de plus en plus difficile de distinguer entre bavure et représailles ».
Bavure ou représailles ?
Certains incidents avaient déjà éclaté par le passé, faisant monter progressivement les tensions entre les deux camps. En 2017, la Russie était accusée d’avoir bombardé les positions des FDS.
En février 2018, les forces gouvernementales syriennes lançaient une offensive contre un QG des FDS. En guise de réponse, l’aviation américaine avait effectué des frappes sur Deir Ezzor, chef-lieu de la région, faisant plus d’une centaine de morts parmi les forces pro-gouvernementales. Le 29 avril, des combats avaient éclaté entre les FDS et les forces gouvernementales, faisant six morts.
Enfin, le 24 mai, le régime syrien avait accusé l’aviation américaine d’avoir effectué un raid aérien et détruit des installations militaires gouvernementales. Un incident similaire mais moins meurtrier que celui d’aujourd’hui.
- Même en suivant l’hypothèse d’un raid américain en guise de représailles, « il n’était probablement pas intentionnel de leur part d’avoir autant de morts », pense Dorothée Schmid.
Assad gagnant
Ce week-end, les FDS avaient repris la localité de Dachicha aux combattants de Daech, arrivant à trois kilomètres de la frontière irako-syrienne. Cette victoire semblait revêtir une certaine importance stratégique puisque la ville était pour les djihadistes la plaque tournante entre la Syrie et l’Irak.
Chassé de Deir Ezzor, Daech s’est retranché dans le désert. Depuis ces endroits difficiles à prendre, l’organisation compte effectuer des attaques surprises comme à Badiya, le 22 mai.
Bachar Al Assad, lui, semble être le grand gagnant de l’évolution actuelle de la guerre. Alors que Daech ne contrôle plus que des poches sur son territoire, il pourrait bénéficier d’un retrait des troupes américaines, qui soutiennent les rebelles.
Dorothée Schmid souligne également l’importance de la compatibilité entre les Kurdes, qui forment une grande partie des FDS, et le gouvernement. Un accord de coexistence pourrait être trouvé entre les deux parties, affaiblissant encore les partisans de la démission d’Assad. Un tel compromis pourrait en revanche faire émerger certains problèmes avec la Turquie, opposée à l’autonomie des Kurdes et qui contrôle actuellement une partie du territoire syrien.
Par Raphaël Hasenknopf pour La Croix.
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