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La bleuite, le virus du soupçon

Interventions médiatiques |

interviewé par Fabrice Drouelle pour l'émission "Affaires sensibles" sur

  France Inter
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Aujourd’hui dans Affaires sensibles : la bleuite, l’épidémie du soupçon qui a décimé le FLN algérien. Avec :

  • Jean-Paul Mari grand reporter et écrivain
  • Élie Tenenbaum Historien, spécialiste de sécurité internationale et de l’histoire des relations internationales
Contenu intervention médiatique

En 1957, voilà 3 ans que le FLN, le Front de libération nationale, mène une campagne d’attentats pour faire entendre ses revendications d’indépendance. Le gouverneur de l’Algérie française a donné les pleins pouvoirs aux militaires pour mater cette rébellion toujours plus forte. Tout le pays s’embrase, en particulier Alger, la capitale où est établie la majorité du million de français non musulmans comme on dit alors pour désigner ceux venus de l’Hexagone, puisqu’à cette époque-là, tout le monde est français. Les noms de ces militaires résonnent encore aujourd’hui : Massu, Bigeard, Aussaresses, des noms pour toujours associés à la violence des armes, à la répression, à la torture.

En 1957, alors que se déroule la bataille d’Alger, parachutistes contre insurgés du FLN, exécutions contre attentats, un capitaine de 34 ans arrive en Algérie. Il a choisi cette affectation, pour y mener des opérations qui ne demandent ni de gros moyens, ni de déploiement de troupes. Paul-Alain Léger mène une guerre souterraine, clandestine, une guerre secrète.

En quelques mois, il infiltre le FLN, il en manipule les responsables, et les conduit à mener des purges sanglantes dans leurs propres rangs. L’ennemi qui se détruit lui-même…un succès, une victoire militaire qui fait 4 000 morts. La bleuite est une épidémie, le soupçon est le virus, et le capitaine Paul-Alain Léger celui qui l’a inoculé.

 

Pourriez-vous définir la notion de guerre de contre-insurrection ?

La notion de contre-insurrection n’est pas réellement employée par les autorités françaises durant la guerre d’Algérie. En revanche, les français qualifient de « révolutionnaire » la guerre que mène le Front national de libération contre la présence française, comme ils l’avaient fait pour désigner la guérilla Vietminh en Indochine où avait déjà combattue une partie importante du corps des officers français en Algérie. L’expression « guerre de contre-insurrection » émerge progressivement aux Etats-Unis durant le mandat du président Kennedy.

La notion englobe l’ensemble des stratégies visant à lutter contre les insurrections caractéristiques de la période de décolonisation, qui combinent une structure clandestine menant des actions de guérilla à une rébellion populaire. Dès lors que les insurrections ne se limitent pas à des tactiques de guérilla classique mais s’appuient sur un soutien de la population, la contre-insurrection se doit d’allier des opérations de contre guérilla et de renseignement à des actions sur les populations. Elles ont pour objectif de leur proposer une alternative politique, économique et sociale, au projet porté par les insurgés. En ce sens, la guerre de contre-insurrection doit relever d’une stratégie intégrale.

Quelles sont les différentes facettes de la guerre psychologique ?

La guerre psychologique désigne d’une part les actions dont l’objectif est de proposer aux populations une alternative politique au projet des insurgés et d’autre part les opérations visant à modifier les perceptions de l’adversaire militaire. La bleuite s’inscrit dans cette deuxième facette de la guerre psychologique, en tant qu’opération d’intoxication.

L’épisode de la bleuite occupe-t-il une place importante dans la culture militaire française ?

L’histoire de cette opération est principalement connue au sein des services de renseignements mais n’est pas particulièrement mise en avant par l’appareil militaire français, soucieux de ne pas célébrer un épisode militaire contraire au droit de la guerre. A l’inverse, les références à cette opération sont beaucoup plus fréquentes en Algérie où est fortement ancré le souvenir de cette échec pour le FLN. De plus, la mémoire de cet épisode est également instrumentalisée dans le pays pour diaboliser Paul Alain Léger et ainsi occulter la responsabilité des cadres algériens dans les purges commises par le FLN durant le conflit.

[...]

> Retrouver l'intégralité de l'émission sur France Inter.

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Élie TENENBAUM

Élie TENENBAUM

Intitulé du poste

Directeur du Centre des études de sécurité de l'Ifri