« Les trois raisons de la bonne santé des vendeurs d'armes français »
L'amiral Edouard Guillaud, à la tête de la société française d'exportation d'armement ODAS, est revenu ce mardi à l'Institut français des relations internationales sur la réussite des groupes français en matière de vente d'armes.
Les vendeurs d'armes français se portent bien. En 2016, les exportations du secteur qui ont atteint les 20 milliards d'euros de prises de commandes, grâce notamment au contrat géant de 12 sous-marins de DCNS conclu avec l'Australie et la vente de 36 Rafale à l'Inde, ont battu des records. Une réussite sur laquelle est revenu l'amiral Edouard Guillaud, ex Chef d'état-major des armées (2010-2014), aujourd'hui à la tête de la société française d'exportation d'armement ODAS, lors d'un débat à l'Institut français des relations internationales (IFRI) ce mardi 21 mars. Voici les trois raisons qu'il avance pour expliquer ce renouveau français.
1. Avoir les bonnes personnes et les bonnes méthodes
Troisième exportateur d'armes au niveau mondial derrière les États-Unis et la Russie, Paris devrait dépasser Moscou et occuper la deuxième place en 2018, selon le cabinet IHS. Une réussite inimaginable il y a de ça une dizaine d'années. "Jusqu'en 2007 nous n'avions pas de méthode, estime Edouard Guillaud. Cette année-là, Nicolas Sarkozy a créé la "war room" qui a connu des réussites avec la vente des sous-marins Scorpène au Brésil (en 2009, Ndlr) mais aussi des échecs retentissants". En premier lieu, celui de la vente avortée de 60 Rafale aux Emirats arabes unis (EAU) en 2012.
Mais pour Edouard Guillaud cette cellule opérationnelle basée à l'Élysée et destinée à huiler les rouages entre les divers services engagés dans des opérations commerciales à l'international, n'était pas au bon endroit. "En 2012, Jean-Yves Le Driana demandé au président de la République de récupérer cette "war room" pour l'installer au ministère de la Défense. C'était une bonne idée". Le PDG d'ODAS loue à ce sujet l'engagement sans faille du patron de l'Hôtel de Brienne. "Il s'est énormément investi, a fait preuve d'empathie et de savoir-faire, poursuit-il. Les résultats ont été au rendez-vous".
2. L'importance du matériel "combat proven"
Le deuxième argument pour expliquer ce succès tient aussi selon l'amiral Guillaud au "combat proven", c'est à dire au fait que le matériel ait été utilisé avec succès par l'armée française. "C'est un élément important de notre réussite, appuie-t-il. Le "combat proven" a été bénéfique notamment en Libye. Le Rafale mais aussi les AASM (armement Air-Sol modulaire produit par Safran) ont très bien fonctionné. Cela a joué".
En 2011, les Rafale furent notamment les premiers à opérer au-dessus de Benghazi et de Tripoli. Attaque de précision avec des AASM, frappe dans la profondeur avec des missiles de croisière SCALP, collecte de renseignements dans le cadre de la mission ISTAR (Intelligence, Surveillance, Tactical Acquisition and Reconnaissance), les chasseurs français s'étaient en effet positivement distingués comme l'ont signalé plusieurs observateurs à l'époque.
3. Vendre au bon moment et s'adapter
Autre facteur essentiel selon Edouard Guillaud: vendre au bon moment. "On a essayé de vendre le Rafale trop tôt, on aurait dû le vendre en 2008 et pas en 2000, juge-t-il. Pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, nous avons essayé de le vendre aux Émirats Arabes Unis, mais ils avaient des Mirage 2000 depuis moins de 5 ans. C'était peu. En revanche, aujourd'hui nous entrons dans la phase de renouvellement".
Enfin, Edouard Guillaud pointe l'importance de s'adapter aux revendications des clients. "Les pays du Moyen-Orient qui connaissent des difficultés budgétaires avec la baisse du baril de pétrole demandent des financements, ajoute-t-il. L'Arabie saoudite par exemple commence à nous demander des financements. C'est une tendance de fond, l'administration française doit s'y préparer". S'agissant de l'allié saoudien, cajolé durant le quinquennat de François Hollande, le PDG d'ODAS a toutefois tenu à relativiser, soulignant le fait que la France avait gagné "peu de gros contrats" en cinq ans mais bénéficié "de flux de contrats liés à de la maintenance opérationnelle".
Lire l'article sur Challenges.
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