L’échec de l’invasion de février 2022, lors de laquelle les troupes russes n’ont pas réussi à prendre rapidement le contrôle de Kyiv, comme elles l’espéraient, a « complètement modifié la situation », analyse le chercheur de l’Institut français des relations internationales (Ifri) Dimitri Minic, causant une « guerre longue et meurtrière en Ukraine, une rupture profonde avec l’Occident, une expansion de l’Otan et un renforcement du flanc oriental de l’Otan ».

« Le Kremlin s’est donc retrouvé face à deux problèmes: renforcer la présence militaire russe au nord-ouest (pays baltes et Finlande) pour gérer une éventuelle guerre générale avec l’Otan, et maintenir l’effort de guerre en Ukraine ». La réponse à ces deux problèmes consiste, depuis l’été 2022, à « augmenter drastiquement les effectifs de l’armée russe, notamment dans les branches les plus touchées par la guerre en Ukraine: armée de terre, troupes aéroportées, infanterie de marine... »

L’exécutif russe y parviendra-t-il ? « Le Kremlin a réussi à augmenter ses effectifs dans l’armée et en Ukraine de plusieurs centaines de milliers depuis le 24 février 2022 », rappelle Dimitri Minic, qui a consacré en 2023 un livre à la pensée et à la culture stratégiques russes.

Aujourd’hui encore, la Russie réussirait à recruter « environ 30 000 hommes en moyenne par mois », ce qui est « assez pour soutenir les pertes importantes subies sur le champ de bataille et la stratégie coûteuse consistant à attaquer partout et tout le temps sur la ligne de front – mais en revanche insuffisant pour créer une supériorité décisive sur l’armée ukrainienne ».

Pour autant, conclut Dimitri Minic, « rien ne dit que ce taux de recrutement se maintiendra, voire permettra d’augmenter les effectifs de Moscou au point d’atteindre 1500000 hommes », l’objectif fixé par Vladimir Poutine... « à moins qu’une nouvelle mobilisation soit décidée par le Kremlin ».