Spoutnik V, le vaccin russe qui sème la zizanie dans la diplomatie européenne
Le Spoutnik V n'est pas encore disponible dans l'Union Européenne, mais il sème la zizanie. Dimanche soir, Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, a qualifié le sérum russe de de "vacin de complément", indiquant que l'UE n'en avait "absolument pas besoin".
De quoi s'attirer les foudres du Kremlin : "Nous nous interrogeons sur les intérêts que défendents ces gens. Ceux des entreprises pharmaceutiques ou ceux des citoyens européens ?" a lancé Vladimir Poutine, précisant que lui-même se ferait vacciner ce mardi. Les fabricants du Spoutnik V ont quant à eux fustigé un "nouveau commentaire biaisé", vantant leur produit efficace à 91,6% contre les formes symptomatiques du Covid-19, selon les études cliniques.
Merkel et Breton opposés
En Allemagne, Angela Merkel défend une ligne opposé à celle de Thierry Breton. La chancelière s'est dite prête à se faire livrer des vaccins russes via une commande européenne groupée. Elle a précisé vendredi dernier que, s'il devait y avoir une obstruction, "l'Allemagne devrait agir pour elle-même". Paul Maurice, chercheur à l'Institut français des relations internationales et expert de la politique intérieure allemande, indique :
Elle est très pragmatique. Elle peut condamner les agissements de la Russie dans l'affaire Navalny ou le dossier ukrainien, tout en considérant le vaccin russe comme l'une des solutions.
La dirigeante cherche à imaginer une sorte de sortie de crise rapide, alors qu'elle vient d'annoncer une prolongation des restrictions sanitaires. Paul Maurice poursuit :
Une partie de la population des Länders de l'Est concidère le Russie comme une puissance économique, culturelle mais aussi scientifique. Ce sont des gens qui ont été vaccinés par des vaccins soviétiques dans leur jeunesse. Ils ont confiance.
Depuis le 4 mars, l'Agence européenne des médicaments (EMA) conduit une procédure d'homologation du vaccin Spoutnik V. La Russie - qui a promis 50 millions de doses à l'UE d'ici juin - l'a déjà accusée de faire traîner le dossier et plusieurs pays ont pris les devants, sans attendre l'accord de l'autorité sanitaire européenne. La Hongrie, le République tchèque, la Slovaquie ont passé commande. Le premier ministre slovaque, Igor Matovic; est lui-même allé réceptionner la première cargaison de Spoutnik V sur le tarmac de l'aéroport de Kosice, à l'est du pays. Une livraison qui a déclenché une grave crise politique et pourrait faire exploser la coalition au pouvoir.
La conduite à tenir face à la diplomatie vaccinale russe divise donc au sein même des États. Tatiana Kastouéva-Jean, chercheuse à l'Ifri et spécialiste de la Russie, met en garde :
Pour Poutine, ce vaccin est un objet de fierté. Le nom de Spoutnik, dans la lignée de la conquête spaciale, n'est pas choisi au hasard. Il faut que l'Union Européenne le traite comme les autres vaccins, sans géopolitiser le sujet.
Depuis que l'efficacité du vaccin a été reconnue par la communauté scientifique,
Poutine est dans une position de gagnant-gagnant
Il n'y a alors, insiste la chercheurse, que deux issues: soit les Européens acceptent le vaccin et reconnaissent implicitement la réussite scientifique russe, soit il n'est pas autorisé et le Kremlin
pourra dénoncer un traitement inégal.
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