Succession de Vladimir Poutine: que se passerait-il si le président russe venait à disparaître?
La guerre contre l’Ukraine a ravivé les spéculations sur la santé de Vladimir Poutine. Immanquablement se pose la question de sa succession, et plusieurs noms circulent.
Un cancer (du pancréas, de la thyroïde, du sang) ? La maladie de Parkinson ? Des problèmes de dos handicapants ? Les rumeurs sur l’état de santé de Vladimir Poutine, 70 ans, ont beau courir depuis longtemps, elles ont gagné en intensité ces derniers mois. Si le président russe et son médecin sont probablement les seuls à connaître la vérité, les spéculations, dans le contexte de la guerre déclenchée par un Vladimir Poutine trop facilement qualifié de "fou", forcent à s’interroger sur sa succession. S’il partait ou disparaissait, que se passerait-il ?
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Quels sont les successeurs potentiels ?
"Dans la situation actuelle, la question de la préparation est essentielle : le départ de Poutine sera-t-il soudain et inattendu, ou aura-t-il le temps de désigner un successeur ?" contextualise l'experte russe. Mikhaïl Michoustine, 56 ans, est en place. Dans le cas où il deviendrait soudainement Président par intérim, "sans préparation adéquate, il se trouverait dans une situation très difficile", dépendant de l'administration présidentielle. Même s'il fait partie des privilégiés qui pratiquent le hockey sur glace avec Vladimir Poutine, les chances qu'il lui succède semblent minces. Nommé en 2020 à la Maison blanche, le siège du gouvernement russe, le patron du fisc était méconnu - si pas inconnu - du grand public. "Malgré tous ses mérites", il "n'est pas assez proche de Poutine et n'a pas pu devenir plus qu'un technocrate politique", pense Tatiana Stanovaya. Nombre d'observateurs estiment, dès lors, qu'il sera remplacé.
Selon Tatiana Kastouéva-Jean, directrice du Centre Russie/Nouveaux États indépendants de l'Institut français des relations internationales, le successeur du Président "sera certainement désigné parmi les personnes qui sont déjà dans les cercles du pouvoir, mais probablement pas les plus exposées, comme c'était le cas pour Vladimir Poutine lui-même" à l'époque où il avait été choisi par Boris Eltsine et son entourage - la Famille - pour assurer leurs arrières. "
Cela peut arriver tardivement, au dernier moment", ajoute l'experte. "Tout cela dans l'optique de laisser l'incertitude, l'imprévisibilité, la surprise jouer à plein."
Mais, en vérité, "on n'en sait strictement rien !" rappelle Tatiana Kastouéva-Jean. Comme le relève l'experte de l'Ifri, "tout cela peut être aussi de la manipulation d'information, téléguidée depuis le Kremlin". Faire circuler des noms permet "d'induire en erreur les Occidentaux, qui croiront qu'il [Vladimir Poutine] n'en a plus pour longtemps".
Quoi qu'il en soit, "la société russe, atomisée, lobotomisée, gobera ce qu'on lui imposera. Une partie de la société, dégoûtée, comprend bien, évidemment, ce qu'il se passe, mais elle n'a pas les moyens de faire quoi que ce soit, les risques sont vraiment beaucoup trop grands. À mon avis, le changement de pouvoir ne se fera pas par la rue, malheureusement, tellement la société et les forces d'opposition ont été affaiblies, voire détruites."
Comment Vladimir Poutine prépare-t-il sa succession ?
"Je ne sais pas et personne ne sait comment Poutine prépare sa succession", tranche Tatiana Stanovaya.
"Trois mots caractérisent le processus : tabou, imprévisibilité et incertitude une fois que la transition aura eu lieu", résume Tatiana Kastouéva-Jean.
"Tabou, parce que Poutine n'a jamais voulu qu'on spécule sur sa succession. Il a coupé court à toutes les rumeurs avec la réforme constitutionnelle de 2020." Cette modification, en lui permettant de se représenter aux élections de 2024 et de régner jusqu'en 2036 (pour autant que sa santé le lui permette), a étouffé les ambitions immédiates et les velléités de lui chercher un dauphin. "Il ne voulait pas que les loyautés s'érodent, qu'elles soient clivées entre plusieurs personnes." Il ne voulait pas apparaître en fin de règne.
Sa succession sera également marquée par "l'imprévisibilité et la manipulation", poursuit l'experte. Vladimir Poutine, "seul maître" du jeu, dont il peut changer les règles à son gré, décidera s'il reste ou non au Kremlin, combien de temps et qui sera son successeur le cas échéant.
"Il ne laisse personne d'autre avoir la main sur ces questions. Tout est fait pour rendre l'anticipation peu prévisible, tout est fait pour manipuler, autant les opinions publiques que les élites, et pour laisser planer le doute. Tout le processus est organisé pour surprendre, pour ne pas laisser le temps de s'organiser."
La transition promet en tout cas de déboucher sur une période d'incertitude, ajoute Tatiana Kastouéva.
"Dans le régime très personnaliste qui s'est créé, où les institutions sont très faibles, où il n'y a pas de garde-fous, on ne sait pas trop comment va évoluer le système sans Poutine…"
Le "poutinisme" survivra-t-il à Poutine ?
"L'opposition a tendance à croire que si Poutine part, son régime s'en ira avec lui et il y aura une chance de voir une 'nouvelle perestroïka'", remarque la politiste Tatiana Stanovaya. Mais "les conservateurs pensent que ce moment serait l'occasion de serrer la vis". Pour autant, le successeur de Vladimir Poutine "n'aura pas autant de pouvoir que lui, qui est déjà resté vingt-deux ans au pouvoir", estime Tatiana Kastouéva-Jean. "Ce n'est pas parce qu'il va nommer le successeur que tout le pouvoir et l'autorité lui seront transmis en même temps. Le système va-t-il tenir ou pas ?" Selon la politologue de l'Ifri, "sur le fond, cela risque de rester la même chose". Mais, "sur la forme et le style, les relations pourraient aller dans le sens d'une normalisation, sans toutefois que la Russie rentre complètement dans le rang du système international tel qu'il était là avant."
> L'article en intégralité sur La Libre.
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