Une nouvelle course aux armements nucléaires s'amorce
Le nombre d'ogives nucléaires dans le monde, divisé par cinq depuis la fin de la Guerre froide, devrait repartir à la hausse dans les années qui viennent sous l'effet du développement de l'arsenal chinois, selon le Sipri, institut de référence sur les questions d'armements. Washington et Pékin consacrent de plus en plus d'argent à la modernisation de leur arsenal.
C'est une nouvelle course aux armements nucléaires qui s'amorce dans le monde, selon deux rapports d'organisation de référence aprus en juin 2022. Une course qualitative d'abord, avec la modernisation des arsenaux détenus par les neuf pays dotés de telles armes, qui remplacent leurs missiles vieillissants et développent des vecteurs plus difficiles à intercepter, de plus longue portée.
La moitié des dépenses mondiales pour Washington
Les dépenses en ce sens ont recommencé à augmenter l'an dernier, voire dès 2020 selon le rapport publié par la Campagne internationale pour abolir les armes atomiques. Les Etats-Unis concentrent à eux seuls plus de la moitié de ces dépenses : 44,2 milliards de dollars l'an dernier (+12,7 % sur 2020), sur un total de 82,4 milliards dans le monde.
La Chine y a consacré 11,7 milliards (+10,4 %), tandis que les budgets de la Russie (8,6 milliards), de la France (5,9 milliards) et du Royaume-Uni (6,8 milliards) augmentaient de manière plus modeste. L'Ican a remporté le prix Nobel de la paix en 2017 pour avoir oeuvré au Traité d'interdiction des armes nucléaires, qui a été ratifié par 62 pays mais par aucune des puissances nucléaires.
Pékin gâche la fête
La course est aussi numéraire, c'est-à-dire qu'elle porte sur le nombre d'ogives nucléaires. La décennie qui vient va vraisemblablement voir le nombre d'armes nucléaires repartir nettement à la hausse, estime le think tank de référence Sipri (Institut international de Stockholm de recherche sur la paix), dans un rapport. Sous l'influence de Pékin notamment : « Une augmentation substantielle de son arsenal nucléaire est en cours, avec des images satellites indiquant la construction de plus de 300 nouveaux silos de missiles », affirme le Sipri. L'époque où le nombre de missiles des neuf pays à statut nucléaire diminuait d'année en année est révolue, ajoute-t-il.
- Jean-Louis Lozier, spécialiste de la question à l'Institut français des relations internationales, souligne qu'il y a « de quoi être préoccupé par l'essor de l'arsenal chinois, qui menace l'équilibre du duo de rivaux que formaient les Etats-Unis et la Russie, où chacun disposait d'à peu près 1.600 têtes opérationnelles, en suprématie complète sur Pékin. L'équation change du tout au tout si Pékin, qui possède actuellement 200 ogives, monte à 700 d'ici à 2027, voire 1.000 à la fin de la décennie, comme le prévoit un rapport du Pentagone. La parité avec Moscou dans le cadre d'une rivalité bilatérale convenait à Washington. Que se passe-t-il si on bascule dans une rivalité trilatérale ? Si les Etats-Unis se retrouvent en infériorité face à deux rivaux dont l'arsenal combiné compte 1.000 ogives nucléaires de plus qu'eux ? »
Cette nouvelle course aux armements revient sur quarante années de réduction spectaculaire des arsenaux. Le nombre d'ogives nucléaires a, en effet, été divisé par cinq depuis la fin de la Guerre froide, sous l'effet des traités signés par Washington et Moscou. Selon le Sipri, on ne dénombre plus que 12.700 bombes et missiles nucléaires dans le monde, contre 86.000 lors du record de 1986. La Russie en conserve 5.977 (-280 sur un an en raison du démantèlement effectif de missiles retirés du service il y a des années), les Etats-Unis 5.428 (-120), la Chine 350, la France 290, le Royaume-Uni 225, le Pakistan 165, l'Inde 160, Israël 90 et la Corée du Nord sans doute 20.
La majorité de ces ogives sont d'ailleurs en attente de démantèlement, le nombre de celles qui sont opérationnelles étant désormais sans doute inférieur à 4.600 dans le monde , dont 90 % entre les mains des seuls Etats-Unis et de la Russie.
> Lire l'intégralité de l'article sur le site des Echos.
Média
Partager