«Vostok 2022» : Russie et Chine scellent leur «amitié» par des exercices militaires conjoints
Du 1er au 7 septembre, la Chine, l'Inde, la Biélorussie et la Syrie vont, parmi d'autres pays, mener de grandes manœuvres aux côtés de la Russie.
En pleine guerre en Ukraine, le timing a de quoi inquiéter. Pourtant, c'est un classique de fin d'été, qui n'a concrètement aucun lien avec le conflit. Ce jeudi, et jusqu'au 7 septembre, la Russie lance son grand exercice militaire conjoint «Vostok», organisé tous les quatre ans à la fin de l'été dans l'Extrême-Orient du pays. Cette année, la Chine, la Biélorussie et la Syrie, alliés reconnus de la Russie, seront notamment de la partie. Notons également la présence plus surprenante de l'Inde. «Des contingents militaires étrangers participant aux exercices Vostok-2022 sont arrivés au terrain d'entraînement Sergueïevsky dans le kraï du Primorié et ont commencé à se préparer et à recevoir leurs équipements et leurs armes», a annoncé le ministère russe de la Défense le 29 août.
[...]
Mais par cet exercice, la Chine veut surtout « montrer, et particulièrement aux États-Unis, qu'il existe une véritable 'amitié' sino-russe – terme consacré depuis plusieurs mois – et que leur coopération militaire esttout à fait opérante », analyse Marc Julienne. L'idée est de prouver au monde qu'il existe un véritable front anti-occidental, avec deux grandes puissances.
Taïwan en toile de fond
La présence de la Chine est loin d'être une surprise. Russes et Chinois organisent déjà régulièrement des exercices communs, dans le cadre des «Peace Missions» de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS). En 2014, l'un de ses exercices avait été le témoin « d'un nombre de troupes et d'équipements records », se souvient le chercheur à l'Ifri. À cette époque, ces manoeuvres d'une tout autre envergure que le «Vostok 2022» avaient déjà pour objectif «de montrer que la Russie n'était pas isolée sur la scène internationale après l'annexion de la Crimée », souligne-t-il.
Mais la Chine voit également dans ces manoeuvres conjointes un intérêt très personnel. Avec la crise diplomatique et militaire qui l'oppose à Taïwan en toile de fond, le pays veut également « montrer qu'il a des partenaires de sécurité ». Dans ce contexte, les manoeuvres prévues en mer du Japon seront à surveiller de près. Les navires russes et chinois vont notamment s'entraîner à « défendre les communications maritimes » et à « appuyer des forces terrestres » dans les zones côtières. D'autant que les relations sino-japonaises sont très mauvaises et celles entre la Russie et le Japon se sont radicalement dégradées.
Un contentieux oppose de fait les deux pays sur l'administration des Îles Kouriles, qui appartiennent à la Russie mais dont la partie méridionale est revendiquée par leJapon. «C'est un contentieux qui dure et qui s'est durci avec la guerre en Ukraine, car le Japon est le pays asiatique qui a le plus clairement soutenu l'Ukraine », rappelle Marc Julienne. Le 21 mars dernier, la Russie a d'ailleurs choisi de mettre fin aux négociations de paix concernant ces îles à la suite des sanctions économiques prises par le Japon.
La délicate position indienne
Si la présence de la Chine semble donc logique, celle de l'Inde est plus étonnante. Le pays fait partie de l'OCS, mais se rapproche beaucoup des démocraties occidentales ces dernières années, notamment des États-Unis et de la France. De plus, « c'est un pays très hostile à la Chine », rappelle Marc Julienne. En juin 2020, le conflit territorial entre les deux pays, initié par la guerre sino-indienne de 1962, avait pris une nouvelle tournure meurtrière, causant la mort de 20 soldats indiens et 40 militaires chinois.
Que vient donc faire l'Inde aux côtés de ses ennemis, dans un exercice militaire organisé par la Russie ? «L'Inde est dépendante de la Russie sur plusieurs points, souligne le spécialiste de l'Ifri. Il existe beaucoup d'accords entre les deux pays, notamment sur l'énergie, et la Russie a vendu un nombre très important d'équipements militaires à l'Inde depuis 20 ans ». Si, aujourd'hui, l'Inde se tourne vers l'Occident en matière d'armement, « tous ses équipements actuels sont russes et ont besoin de maintenance et de munitions ».
[...]
>> Retrouver l'article en intégralité sur le site du Figaro.
Média
Partager