Vers un partenariat franco-nordique ?
François Hollande s'est rendu en Islande le 16 octobre 2015. Si l’actualité de la COP21 conduit la France à intensifier ses relations avec les pays nordiques, il serait pertinent de saisir cette opportunité pour bâtir un dialogue franco-nordique régulier.
La dernière visite d'un président de la République en Islande remontait à 1990, autant dire que l'événement, qui constitue par ailleurs la première visite de François Hollande dans un pays nordique depuis le début de son mandat, est à noter. L'agenda international de cette visite était double pour la France : d'un côté, la préparation de la Conférence de Paris sur le climat (COP21) et la nécessité de mettre en avant l'enjeu climatique que représente l'Arctique, de l'autre l’annonce de la feuille de route nationale pour l'Arctique, quelques mois avant celle de la politique arctique de l'Union européenne. Si l’actualité de la COP21 conduit la France à intensifier ses relations avec les pays nordiques, il serait pertinent de saisir cette opportunité pour bâtir un dialogue franco-nordique régulier, à l’image de ce que font notamment nos partenaires britanniques au travers du Northern Future Forum, sur les nombreux enjeux de long terme que la France et les pays nordiques partagent.
La France, qui est observateur permanent au sein du Conseil de l'Arctique, principal forum de la gouvernance arctique, est un acteur de longue date de la région, tant sur le plan de la recherche polaire que des activités économiques ou de la présence militaire. Cette région clé quant à l’étude du changement climatique est devenue, du fait des conséquences de ce dernier, une nouvelle frontière des relations internationales. L’ensemble des acteurs du G7, la puissance régionale russe, ainsi que la Chine et l’Inde, pour ne citer qu’eux, se retrouvent réunis, à différents niveaux, au sein du Conseil de l’Arctique. Seule région à lier Amérique, Europe et Asie, l’Arctique devient un accélérateur de la mondialisation du fait de la réduction des distances que permettent, dans des volumes toutefois limités à ce stade, les routes maritimes arctiques. Une nouvelle donne qui a mis au centre du jeu des pays nordiques jusque-là trop souvent oubliés, du moins vu de France. La présence de bâtiments de la marine chinoise en mer de Béring, au moment où le président des Etats-Unis Barack Obama se trouvait en Alaska début septembre 2015, est venue illustrer le fait que l’Arctique est devenue la partie retour du match qui se joue entre la Chine et les Etats-Unis en mer de Chine méridionale, cette fois dans l’arrière-cour des Etats-Unis. D’où l’importance de nous intéresser davantage au (Grand) Nord.
Qu’il s’agisse d’enjeux environnementaux, de transition énergétique, de réforme de l’Etat, d’adaptation du marché du travail aux réalités d’une économie mondialisée ou d’enjeux de sécurité, pour ne citer que quelques exemples, les pays nordiques que sont le Danemark, la Finlande, l’Islande, la Norvège et la Suède font régulièrement parler d’eux dans les débats français et européen. Un intérêt pour ces pays existe depuis longtemps au sein des partis politiques français. Pourtant, aucune initiative similaire à nos partenaires britannique, américain ou allemand n’a été prise côté français afin d’établir un dialogue régulier de haut niveau entre la France et les pays nordiques.
Certes, il existe des rapprochements à l’échelon bilatéral, particulièrement dans le domaine de la défense, comme en témoigne la lettre d’intention signée entre les ministres français et danois de la Défense en juin 2014. Dans un contexte où l’activité politique entre la France et les pays nordiques aura rarement été aussi dense, il serait opportun de prendre exemple sur une réunion comme le Northern Future Forum, instaurée en 2011 et qui réunit chaque année les Premiers ministres britannique, nordiques et baltes dans une capitale différente afin de parler d’enjeux d’avenir. Après Londres, Stockholm, Riga et Helsinki, David Cameron a retrouvé ses partenaires nordiques et baltes à Reykjavík les 28 et 29 octobre 2015, quelques semaines après le passage de François Hollande dans la capitale islandaise. Un sommet entre Barack Obama et les dirigeants nordiques à Stockholm en 2013 et l’instauration d’un dialogue régulier entre l’Allemagne et les trois pays nordiques membres de l’Union européenne (Danemark, Finlande, Suède) au niveau des ministres des Affaires étrangères, avec une première réunion à Copenhague en 2014, sont venus confirmer cette tendance d’un intérêt international accru pour les pays nordiques, reconnus pour leur sens de la diplomatie et qui à de nombreux égards représentent un laboratoire des enjeux du XXIème siècle.
La réflexion sur une réforme de l’Union européenne passera également par un échange avec ces partenaires européens, tous membres du marché intérieur et de l’espace Schengen. Faut-il rappeler, à l’heure où l’on parle de frontières nationales, que les pays nordiques avaient créé un espace de libre circulation des personnes encore plus avancé que l’espace Schengen, bien avant que ce concept ne soit effectif à l’échelle européenne.
Dans un contexte où l’actualité accroît l’intérêt de la France pour les pays nordiques, espérons que ce premier déplacement du président de la République dans cette région depuis son élection ne soit qu’un début.
Contenu disponible en :
Régions et thématiques
Utilisation
Comment citer cette publicationPartager
Centres et programmes liés
Découvrez nos autres centres et programmes de rechercheEn savoir plus
Découvrir toutes nos analysesL’essor du programme spatial taïwanais : Construire une industrie, soutenir la sécurité nationale
Taïwan, connu pour son leadership dans le domaine des semi-conducteurs et des technologies de l’information et de la communication (TIC), fait aujourd’hui des progrès significatifs dans l’industrie spatiale. Bien qu’historiquement modeste, le programme spatial taïwanais s’est transformé depuis 2020, sous l’impulsion de la présidente Tsai Ing-wen qui s’est engagée à développer les capacités spatiales du pays. Parmi les étapes clés figurent l’adoption de la loi sur le développement spatial et la création de l’Agence spatiale taïwanaise (TASA), qui a renforcé les ressources et la visibilité des ambitions spatiales de Taïwan.
La surproduction chinoise de puces matures : Des craintes infondées
La Chine, plutôt que d’inonder le marché mondial des semi-conducteurs à technologies matures, s’en dissocie. Si les politiques industrielles chinoises favorisent de plus en plus la production nationale de semi-conducteurs, sa propre demande en puces, en constante augmentation, devrait empêcher une arrivée massive de puces chinoises à bas prix sur les marchés étrangers. Cependant, à mesure que Pékin progresse dans son objectif de réduire la dépendance des industries nationales aux puces étrangères, les entreprises européennes et américaines de semi-conducteurs à technologies matures pourraient ressentir les effets d’un écosystème de semi-conducteurs chinois de plus en plus « involué » (内卷).
La Chine en quête d'un saut quantique
La course mondiale pour exploiter les sciences quantiques s'intensifie. Reconnaissant le potentiel stratégique des technologies quantiques pour le développement économique, militaire et scientifique, la Chine concentre ses efforts sur des percées scientifiques afin de rééquilibrer le rapport de force, notamment dans sa compétition avec les États-Unis. Le président Xi Jinping a souligné l'importance de l'innovation scientifique, en particulier dans les domaines quantiques, pour stimuler le développement national et garantir la sécurité.
L’approvisionnement énergétique de Taïwan : talon d’Achille de la sécurité nationale
Faire de Taïwan une « île morte » à travers « un blocus » et une « rupture de l’approvisionnement énergétique » qui mènerait à un « effondrement économique ». C’est ainsi que le colonel de l’Armée populaire de libération et professeur à l’université de défense nationale de Pékin, Zhang Chi, décrivait en mai 2024 l’objectif des exercices militaires chinois organisés au lendemain de l’investiture du nouveau président taïwanais Lai Ching-te. Comme lors des exercices ayant suivi la visite de Nancy Pelosi à Taipei en août 2022, la Chine avait défini des zones d’exercice faisant face aux principaux ports taïwanais, simulant de fait un embargo militaire de Taïwan. Ces manœuvres illustrent la pression grandissante de Pékin envers l’archipel qu’elle entend conquérir et poussent Taïwan à interroger sa capacité de résilience.